Entrée gratuite sur inscription.
Le funeste épisode du CPE a suscité la loi Larcher, imposant au minimum une concertation des partenaires sociaux avant toute initiative intempestive dans ce domaine. Pour renforcer la légitimité de cette obligation qui ouvre désormais le code du travail, une réforme de la représentativité syndicale a été menée dans la douleur sous la droite, puis la réforme de la représentativité patronale, jugée par certains «impossible», a été conclue sous la gauche.
Epoque révolue. Désormais, plusieurs fois par an, les partenaires sociaux conduisent des négociations. Mais il a suffi que la dernière en date sur la réforme du dialogue social dans l'entreprise n'aboutisse pas pour que soit reposée la question de la pertinence du dialogue social interprofessionnel. Il me semblait pourtant acquis qu'il n'était plus possible de modifier la société par décret et même que l'époque des lois concoctées par la haute administration ou les cabinets ministériels qui énoncent en majesté ce qui est bon pour le monde de l'entreprise et du salariat était révolue.
L’obligation de négocier ne suppose pas une obligation de réussir mais vise à garantir qu’il n’y ait pas de modifications substantielles dans l’organisation du travail sans y associer les forces sociales concernées. Il n’est donc pas rigoureux de s’appuyer sur un échec circonstanciel ou relatif pour invalider l’ensemble de la méthode.
Légitimité. Le vrai sujet est de savoir si les partenaires sociaux traditionnels sont légitimes pour délibérer pour l'ensemble du monde du travail. C'est par exemple un des nœuds du conflit des intermittents, le monde du spectacle n'étant pas directement consulté sur l'élaboration des annexes 8 et 10 de l'assurance chômage qui régissent fortement son fonctionnement.
De même, les partenaires sociaux qui représentent seulement les salariés du privé, peuvent-ils énoncer des règles pour l’ensemble des citoyens concernant la couverture sociale ou plus récemment le compte personnel de formation universel ? La réponse est apportée dans le dialogue social à la française par la transcription au Parlement. Dès lors qu’un accord ou une position commune a pu être acté de manière majoritaire, c’est à la représentation nationale d’assurer la recherche de l’intérêt général tout en respectant l’esprit et les principes de l’accord.
Nouveaux acteurs. Pour autant, le Parlement doit avoir le souci d'élargir et d'améliorer les conditions du dialogue social. À ce titre, j'ai œuvré en tant que rapporteur de la loi formation du 5 mars 2014 pour inscrire dans la loi la reconnaissance et la nécessité d'associer les secteurs des professions libérales, de l'économie sociale et solidaire et du monde agricole aux concertations. Puis j'ai proposé récemment, comme médiateur de l'intermittence, qu'il y ait une concertation systématique des principaux intéressés par les gestionnaires de l'Unedic.
Enfin et pour plus d’efficacité, la méthode pourrait être améliorée. Il n’est plus acceptable que les travaux se déroulent systématiquement au siège du Medef et sur la base du texte qu’il a préparé, ce qui lui donne des avantages tactiques et stratégiques de nature à déséquilibrer la négociation. Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a vocation à abriter le dialogue social et on pourrait espérer que les représentants des organisations de salariés soient en capacité de préparer en commun, sans pour autant renier leurs différences, les rounds de négociation comme le fait le monde patronal.
Le dialogue social est la condition nécessaire de la réforme mais la démocratie sociale à la française nécessite aussi un temps ultime de coproduction avec le législateur.