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Libération
Récit

Les petits bras du dialogue social

Qu'est ce qui fait ramer les négociations entre patronat et syndicats ? Retour sur le second débat des Rencontres du dialogue social.
Pendant le débat «Démocratie sociale et croissance économique font-elles bon ménage ?» avec Pierre Ferracci, Jean-Paul Guillot, Luc Peillon, Jean Peyrelevade, le 3 février. (Albert FACELLY)
publié le 3 février 2015 à 19h05

C’est un anniversaire qui fait des étincelles, bien malgré lui. Alors qu’on fête les 70 ans des comités d’entreprise, les négociations entre patronat et syndicats sur la modernisation du dialogue social ont terminé dans une impasse. A qui la faute ? Pour Jean Peyrelevade, chef d’entreprise retraité, fondateur de l’association Dialogues et banquier d’affaire, «

des forces archaïques ont fait ce qu’il fallait pour que cette nég

ociati

on échoue, du côté syndical comme patronal

». D’après lui, le problème est avant tout culturel. «

En France, la relation entre l’employeur et ses salariés est nécessairement conflictuelle, c’est une idée reçue, admise

, déplore-t-il, regard rivé à l’assemblée comme s’il la prenait à témoin.

En réalité, dans l’entreprise, les salariés comprennent qu’ils ont un intérêt commun avec leurs dirigeants.

»

Compromis

Difficile de mettre d’accord l’ancien PDG du Crédit lyonnais avec Pierre Ferracci, président du cabinet de conseil Groupe Alpha, qui travaille avec les comités d’entreprise. Pour lui, la divergence d’intérêt fait justement partie de la vie de l’entreprise. «

C’est le compromis !»

, vante-t-il. Le mot irrite les tympans du banquier Peyrelevade qui perçoit derrière «

compromis

» les échos d’un conflit et des concessions arrachées au détriment des uns ou des autres. Pierre Ferracci impute plutôt l’échec des négociations récentes à la méthode employée. L’État aurait voulu aller trop vite, tenté d’orchestrer les discussions. «

La place du gouvernement n’est pas la bonne

, juge le dirigeant du cabinet de conseil.

Il y a une confusion totale entre ce que doivent faire l’Etat et les partenaires sociaux.»

La joute Peyrelevade-Ferracci aurait pu être longue, elle s’achève finalement sur un point d’accord. Négociation réussie. Les deux bretteurs reconnaissent que le faible poids des syndicats français handicape toute tentative de dialogue social. Défi énorme. Il faut remotiver les salariés, les inciter à s’investir, à s’engager, alors que les syndicats n’ont plus vraiment la cote. «

Il faut une grande

motivation pour

se

mobiliser aujourd’hui

, estime Jean-Paul Guillot, président de l’association Réalités du Dialogue Social.

Le salarié sait qu’il peut bénéficier de tous les

avantages de la négociation sans avoir à en supporter les

coûts.»

En résulte un taux de syndicalisation minus qui tutoie les 8%. En France, on a peut-être la culture du bras de fer. Mais les muscles sont franchement mous.

(Photos Albert Facelly)