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Libération
Forum citoyen au gabon. Verbatim

«Comment faire la révolution numérique sans ordinateur ni Internet ?»

Événementsdossier
Alors qu’experts et entrepreneurs ont présenté lors du débat «Afrique 2.0» les opportunités offertes au continent africain par les nouvelles technologies, plusieurs jeunes Gabonais ont dénoncé la fracture numérique.
Alban Luherne et Kwame Yamgnane faisait partie des six intervenants à débattre lors de la table ronde "Afrique 2.0".
publié le 11 octobre 2015 à 22h33
Cheyrone Mouloungui, 34 ans, en train de créer une société d’événementiel, et Grace Mboumba, étudiante en management de 26 ans
On nous parle de prendre notre destin en main grâce au l’apprentissage du code, on nous dit que le numérique est une opportunité offerte aux citoyens pour s’informer, s’exprimer et ainsi reprendre le pouvoir, mais nous n’avons même pas accès à l’outil informatique. Les ordinateurs sont trop coûteux pour équiper toutes les maisons. Et nos téléphones, qui ne sont pas des smartphones, ne nous offrent qu’un aperçu limité du web. Pour la majorité des gens au Gabon, Internet, se résume donc aux cybercafés. Cela coûte cher – 500 francs CFA de l’heure environ – et le débit est lent. Et encore, c’est lorsque l’électricité fonctionne, car dans l’arrière pays les coupures sont fréquentes. Tout cela freine le développement du pays.
Sylvain Kameni, consultant informatique de 27 ans
Je suis informaticien de formation. Je possède donc la compétence technique pour créer les sites et outils numériques qui pourraient contribuer au développement de l’Afrique. Des idées, j’en ai aussi. Mais il me manque tout le reste : l’argent, car les banques ne prêtent pas, le savoir-faire entrepreneurial car les incubateurs sont inexistants mais aussi les machines permettant de fabriquer les prototypes qui amorceront le changement. C’est très frustrant ! Quand je sais ce que peuvent faire mes amis partis travailler en Europe, je me dis que le monde fonctionne à deux vitesses.
Clay Etsellah, étudiant en lettre de 31 ans
Certes Internet est difficile d’accès mais en attendant d’avoir des infrastructures meilleures, nous devons rationnaliser son utilisation. Cela veut dire nous responsabiliser et utiliser Internet pour nous informer plutôt que pour nous divertir avec Facebook et Whatsapp. Cela veut dire aussi, apprendre à mieux sélectionner l’information parmi tout ce qui est disponible en ligne. Pour cela, l’école a un rôle très important à jouer.
Henri Ndembi, étudiant en sociologie de 22 ans 
L’accès limité de notre pays au numérique nous fait passer à côté d’opportunités immenses en matière de création d’entreprises. D’abord parce que cela nous coupe de l’information disponible en ligne et cela suffit à décourager certains. Cela rend aussi le e-commerce impossible dans notre pays. Lorsqu’on créé une boutique de vêtements, nous sommes encore obligés de la créer en «in real life» si nous voulons avoir des clients, alors qu’Internet pourrait nous donner accès au monde entier.