Récit. C'est une habitude de plus en plus partagée. Quelques recherches que l'on effectue sur Google avant d'aller chez le médecin, «juste comme ça». Pour voir. Pour savoir. Pour poser les bonnes questions au praticien. Et éventuellement lui suggérer un diagnostic. Avec toute l'arrogance du «Je l'ai lu sur Internet.»
Pas toujours facile à vivre pour le corps professionnel. Christian Saout, secrétaire général du Collectif inter-associatif sur la santé, en convient : «Cela peut agacer». Et cela pourrait devenir pire avec la généralisation des objets connectés de santé : bracelets, balances, thermomètres, tensiomètres, fourchettes, brosses-à-dents… Equipés de capteurs et reliés à internet, ils compilent les accumulent les informations nous concernant, les trient, les comparent, révèlent parfois des anomalies tout en agissant en conséquence, offrant à l'utilisateur un sentiment de contrôle et de toute puissance. L'impression qu'en anticipant les problèmes, il pourra atteindre l'immortalité. «Mais est-ce vraiment une autonomisation ? N'est-ce pas plutôt une mise sous tutelle du numérique ?» interroge Jacques Lucas, vice-président du Conseil national de l'Ordre des médecins.
[ Retrouvez la vidéo «Nouvelles technologies : une bonne nouvelle pour les patients ?» ]
Loin d’être réfractaire à ces «dispositifs médicaux» (dès lors qu’ils sont contrôlée par les autorités compétentes, utilisés dans le cadre d’une prescription médicale et pris en charge par l’assurance maladie), il invite à plus de pédagogie en la matière.
Bien utilisés, ces outils peuvent apporter beaucoup. Une pompe à insuline connectée pourra ainsi agir avant que la patient ne prennent conscience de quoi que ce soit. Les informations relatives au patient pourraient aussi lui être rappelées. Tout cela à condition évidemment que les données restent protégées.
L'enjeu ? L'amélioration des soins mais aussi le raccourcissement des délais d'hospitalisation. «Il faut y tendre des raisons financières, car les hôpitaux n'arrivent plus à faire face, mais aussi parce qu'un patient est mieux chez lui que sur un lit d'hôpital», souligne Carlos Jaime, directeur de la division santé et équipement médicaux de Samsung, dénonçant un système de santé «inefficace».
Mais il ne s'agit pas de barder le patient de capteurs. Il risquerait de saturer et de réagir comme tous ces malades qui cessent de prendre leur traitement pour avoir l'impression de ne plus être malade. «Notre rôle est de faire oublier notre technologie», explique Carlos Jaime. Quant au médecin, il ne se transformera pas «en analyste de données tirées d'un objet acheté à la Fnac», prévient Jacques Lucas. «On ne soigne pas un diabète mais un diabétique. On ne soigne pas une maladie coronaire mais une personne qui a un cœur malade. Notre métier c'est une relation humaine. Les algorithmes ne pourront jamais remplacer le médecin.»