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«Camaraderie fraternelle, prime aux grandes gueules, humour de caserne...»

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«Les hommes sont-ils des femmes politiques comme les autres?» Libération a posé la question à des politiques, sociologues ou historiennes, dans la perspective du forum organisé le 8 février à l'Assemblée nationale. Aujourd'hui la réponse de David Cormand.
David Cormand après l' annonce de des résultats du premier tour de la primaire EELV, au café le canal 8, le 19 octobre 2016. (Photo Laurent Troude pour Libération)
par David Cormand, Secrétaire national d'Europe Ecologie-les Verts (EE-LV)
publié le 4 février 2019 à 9h52

La représentation majoritairement admise concernant les attributs du pouvoir conduit aujourd’hui encore à faire de la politique une «no go zone» pour les femmes.

Tout contribue à placer les femmes à la périphérie de la prise de décision. Quand les hommes sont les «candidats naturels», elles sont des suppléantes. Quand l’homme évolue dans un espace conçu par et pour lui, les femmes y sont des intruses. Le rapport à la politique se nourrit d’un imaginaire viriliste qui exclue les femmes: la posture tribunitienne, le statut de chef de bande, la référence à l’Histoire et au «patrimoine» dont les «héros» les plus identifiés et commémorés sont des hommes.

Le fonctionnement des Partis et les formes d’engagement militant (dont l’étymologie vient de «miles», soldat…) impliquent des pratiques auxquelles nos codes sociaux prédisposent les hommes (réunions nombreuses et tardives, camaraderie «fraternelle», prime aux «grandes gueules», humour de «caserne») et excluent les femmes.

Il faut ajouter que pour certains hommes une confusion persiste entre la capacité de «séduction» dont il faudrait être capable pour faire de la politique et la domination. C’est ainsi que l’espace militant peut devenir un espace de prédation à l’encontre des femmes. La politique comme espace de gestion des enjeux de pouvoir est ce que notre civilisation a trouvé de mieux pour éviter la régulation violente des conflits par les guerres. Mais une persistance rétinienne conduit à toujours voir le «pouvoir» comme un espace où les codes de la violence virile subsistent. Ce n’est pas un hasard si l’éco-féminisme a été le premier lieu d’interaction entre les questions environnementales, sociales, raciales, de non-violence et de droit des femmes. Elles constituent les préoccupations d’une même matrice. Cela n’empêche pas, il faut (se) le rappeler: Même dans un mouvement écologiste attaché à ces valeurs, l’agression contre des femmes dans un cadre militant est possible…

Au-delà de la prise de conscience, le combat pour que la question posée plus haut ne paraisse plus incongrue est encore long et surtout, aucun progrès n’est jamais acquis.

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