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«Je ne pouvais imaginer un seul instant m’arrêter de travailler»

Rebondirdossier
A quelques jours de notre forum « Rebondir », jeudi 28 mars, témoignages de personnes confrontées à la maladie, à un accident, un deuil... Aujourd’hui Christine Batellier.
(Jeff Kubina / Flickr)
publié le 20 mars 2019 à 15h05

«Je ne rebondis pas car la maladie est toujours là avec ces chirurgies. Je suis atteinte d’une maladie auto-immune, la spondylarthrite ankylosante. Elle a été diagnostiquée il y a quinze ans, elle touche les articulations et ligaments, et concerne essentiellement la colonne et le bassin. Du coup, je travaille comme enseignante sur un poste aménagé en élémentaire. Je prends en charge les enfants en difficulté scolaire CP et CE1 sur 80% du temps. C’est une maladie très fatigante, mais je ne pouvais imaginer un seul instant m’arrêter de travailler.

Ma situation a apporté un plus à l’école parce que mon poste a été créé pour ma pathologie. Si je n’étais pas là il n’y aurait pas ce poste.

J’ai eu moi-même l’idée de créer ce poste, on est une très grosse école et j’ai une sensibilité accrue à la difficulté des autres. Je m’occupe d’environ vingt à trente enfants, qui ne sont jamais tous ensemble. Mes collègues sont bienveillants, quand ils voient que je fatigue, ils s’adaptent. Les enfants ne savent pas pour ma pathologie, mais je pense qu’ils s’en doutent, car je me déplace parfois mal, alors ils font attention, ils le ressentent.

Avant je faisais la classe, mais c’était trop lourd. J’ai beaucoup de chirurgie, je dois faire face à de longues périodes d’absence et quand je suis absente je ne suis pas remplacée. Alors, quand je suis là, je fais tout ce que je peux.

Progressivement j'apprends à profiter du moindre plaisir, je ne me prends plus la tête avec des détails anodins, je suis très positive avec les élèves, je les rassure, leur montre leur potentiel, je ne m’embarrasse plus avec des détails. Quand je vais bien, je me fais plaisir.

Avec mon conjoint, c’est un peu compliqué, il a peur de l’avenir – et moi aussi- il fait un peu l’autruche, j’ai l’impression de gérer toute seule et de protéger mon entourage que je ne veux pas embêter avec ma maladie.

Il faudrait qu'à l'extérieur je puisse évacuer; d'ailleurs, c'est un peu mon kiné qui joue ce rôle. Le psy, je le vois plus ponctuellement. Les médecins me disent que je suis «costaude psychologiquement». Les collègues me connaissent depuis longtemps, ils ont vu la maladie évoluer et l'ont acceptée facilement. J'ai beaucoup de chance car je devrais être en invalidité.

Je ne voulais pas être à l’écart de la société, si je ne travaillais pas j’irais moins bien. Avoir un rôle social me permet de m’en sortir plus facilement, d’accepter la maladie et de ne pas vivre que pour elle».

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