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Forum de Strasbourg: tribune

A Strasbourg, l’Union est une réalité palpable

L'Europe: un esprit de résistancedossier
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Dominique Jung, rédacteur en chef des Dernières Nouvelles d'Alsace (DNA) décrit la réalité multiforme d'une Europe qui s'exprime à Strasbourg.
Le tramway franchit le Rhin entre Strasbourg et Kehl, en avril 2017. (Photo Patrick Hertzog. AFP)
par Dominique Jung, rédacteur en chef des Dernières Nouvelles d'Alsace (DNA)
publié le 16 mai 2019 à 9h47

Certains candidats au scrutin du 26 mai, ignares en affaires européennes, semblent n’avoir pas ­compris qu’en cas de succès ils ne vivront pas qu’à Bruxelles ! Il est donc ­urgent de leur dire que le Parlement européen a son siège à Strasbourg, ville où ­l’Europe est une évidence, loin de l’image technocratique savamment entretenue. Les exemples abondent.

Les trams de la Compagnie des transports strasbourgeois desservent la gare allemande de Kehl comme ils ­desservent celle de Strasbourg. Le plus beau pont de la ville est franco-allemand ; c’est une passerelle à haubans de l’architecte Marc ­Mimram, qui permet aux piétons et aux ­cyclistes de franchir le Rhin paisiblement, à l’écart des voitures, depuis 2004.

Personne ne s’étonne de croiser des soldats en uniforme allemand, espagnol ou belge dans un tram strasbourgeois : on sait qu’ils vont rejoindre la caserne où l’état-major du corps de réaction rapide européen (Eurocorps) siège depuis 1993.

La dimension européenne de la ville se vérifie aussi dans le nombre d’ambassades installées auprès du Conseil de l’Europe, instance diplomatique qui réunit plus de pays (47 Etats) que le Parlement européen (28 Etats). Et c’est aussi à Strasbourg que siège la Cour européenne des droits de l’homme, chargée de juger au plus haut niveau, dans la zone des 47 Etats, les litiges complexes qui concernent la bioéthique, la liberté d’expression ou les conditions carcérales.

Ces rappels montrent que l’Union européenne est multiforme. Elle participe à la fluidité de nos vies, qu’il s’agisse des études universitaires commencées en France et poursuivies en Italie ou en Suède, de la tarification revue à la baisse des conversations téléphoniques intra-européennes, des passages de frontière sans interminables files d’attente, de l’utilisation banale d’une monnaie unique et autres avantages impensables il y a quelques décennies.

Seul l’euro permet aux Européens de ne pas vivre sous la tutelle inconditionnelle du ­dollar, cette devise qui, sous couvert d’être la grande monnaie du monde, est d’abord au service des Etats-Unis. Et face aux tentations autoritaires de la Chine et à sa vision ­dominatrice de l’administration, seule une Europe politique cohérente peut faire valoir un autre modèle, fidèle à l’idéal des pères ­fondateurs : la libre circulation des gens, des biens et des idées. L’ignorer serait une dangereuse myopie collective.