Carole Delga participera mardi 26 novembre au Forum «L’usine et le territoire» organisé par Libération avec la région Occitanie/Pyrénées Méditerranée.
Il y a un lien fort entre le sentiment de déclin que connaît aujourd’hui la France et l’industrie. C’est si vrai que lorsqu’on évoque le déclassement de tel ou tel territoire, le moment de rupture évoqué est souvent la fermeture de l’usine. La simple vue de la carte de la France industrielle au XXe siècle le démontre : bien sûr, les bastions du Nord et de l’Est ont marqué les esprits, notamment l’histoire sociale, mais l’industrie s’est progressivement diffusée dans l’ensemble du pays, avec un maillage de petits établissements de moins de 50 salariés, souvent situés dans le périurbain, et aussi des zones rurales et de montagne, notamment dans ma chère région, l’Occitanie.
L’industrie est ainsi devenue un point de repère, celui du travail et donc de la prospérité, un point de rencontre, celui du destin personnel lié à celui d’un collectif, enracinant ces métiers au plus profond du pays et des consciences. L’ouvrier, dans ces territoires, était un homme ou une femme, respecté, pour son savoir-faire. Comme le paysan qui travaille sa terre, il était reconnu pour son geste technique, transmis de génération en génération. Un geste utile, porteur de sens, de fierté et de collectif, bien loin de «l’ubérisation» et de la solitude qu’elle génère, tant professionnellement que socialement.
Pour la France, comme pour l’Europe, le défi industriel est un défi d’avenir. En termes d’emplois, d’abord et avant tout, après que notre pays ait vu la disparition entre 1975 et 2015 de la moitié de ses emplois industriels. Il n’y a là aucune fatalité. Il nous faut retrouver ce volontarisme politique qui a donné naissance à nos grandes réussites industrielles. Nous le voyons en Occitanie, l’une des rares régions qui continue à créer des emplois industriels, où les réussites sont nombreuses : citons Airbus, bien sûr, et ses sous-traitants irriguant tout un territoire, mais aussi CAF et Alstom près de Tarbes, les bassins de Figeac, d’Alès, Béziers, du Gard rhodanien ou Pamiers par exemple ou des PME comme Steel Electronique, dans mon village de Martres Tolosane, au pied des Pyrénées, spécialisée dans la fabrication d’équipements embarqués sur des satellites d’observation.
Je le crois : les lendemains pourraient bien réenchanter l’industrie. D’abord avec l’opportunité constituée par la transition écologique et énergétique et la nécessité de mettre en place de véritables filières d’avenir comme la chimie verte, l’éolien flottant, l’hydrogène vert ou le véhicule de demain, avec des emplois fortement qualifiés et un investissement sans précédent en matière de recherche au service de la planète… Ensuite, parce que la mondialisation est à bout de souffle, et que la fin des «pays usines» se profile, tant la circulation des marchandises impacte le climat. Oui, au XXIe siècle, l’industrie et le progrès ont bien, une nouvelle fois, destin lié et un avenir.