Avec son air confiant en toutes épreuves, Steve, les cheveux tirant vers le blond ondulant au-dessus de ses larges épaules, annonce autour des tasses de thé matinales : «On va devoir changer nos plans. La tempête s'aggrave.» Cela ne fait qu'une journée que les sept équipiers de l'association Clean Ocean Sailing sont embarqués sur La belle Annette, 112 ans d'âge, toute de bois vêtue, pour ramasser un maximum de déchets plastiques sur les plages des Cornouailles, au sud-ouest de l'Angleterre, quand la tempête Dennis met à mal leurs plans. Début février, l'Anglais a décidé d'embarquer pour deux semaines avec des bénévoles pour nettoyer des zones inaccessibles par la terre. Libération a vécu pendant quatre jours avec eux.
Fort de sa formation de pilote de yacht, le capitaine de bord, 45 ans, décide de suivre la côte pour aller se réfugier dans l'embouchure de la rivière Fal. «On va sûrement rencontrer sur le chemin des vagues de trois à cinq mètres, prévient-il. Mais il faut se dépêcher car elles prendront cinq mètres de plus dans la soirée.»
La confiance de Steve étant contagieuse, la peur n’agrippe les tripes et crispe les visages que le moment venu. Quand la dixième, quinzième vague, nous emporte dans son creux pour nous projeter sur la voisine. Quand le bateau centenaire commence à grincer étrangement. Quand les objets de la cabine volent dans tous les sens et que les estomacs commencent à ne plus savoir de quel côté la gravité est censée les porter… A chaque instant, les apprentis marins se rappellent qu’ils sont là pour la bonne cause. La pollution plastique est un fléau dévastateur pour l’environnement, en Angleterre comme partout dans le monde.
Les chiffres annoncés par l’ONU sont vertigineux : en 2010, plus de 275 millions de tonnes métriques de débris plastique ont été produites dans le monde. Entre 4,8 et 12,7 millions ont atterri dans les océans. Les scientifiques et ONG ont documenté des effets négatifs sur plus de 700 espèces, surtout marines, des baleines aux cormorans en passant par les récifs coralliens. Le plastique est indéniablement une des inventions qui a participé le plus à l’amélioration des conditions de vie, d’alimentation et de santé des hommes, ces dernières décennies. Mais ses effets sur l’environnement et le corps humain pourraient ternir pour longtemps ce tableau.
Animaux et végétation sont les premiers…