Menu
Libération

De la popote à la papote cairote

Article réservé aux abonnés
La mamma. La cuisine de Somaya ravive le goût de la révolution égyptienne. Dans son petit restaurant, elle régale ses habitués de mloukhia et de mahchi.
Dans on Fasahat, Somaya se met aux fourneaux dès 15 heures. (Photo Virginie Nguyen Hoang)
publié le 8 novembre 2013 à 18h56

«Ici, tout est question d'amour», affirme Somaya. Elle a une voix gouailleuse, un sourire franc et elle ne ment pas. Ce n'est pas pour rien que son établissement, son Fasahat, perdu dans un passage du Caire, s'est imposé en deux ans comme le lieu de rendez-vous privilégié des fin d'après-midis cairotes. C'est dans ce cocon chaud et douillet, de 9 mètres carrés à peine, que trouvent refuge les âmes perdues de la capitale égyptienne, lassées du bruit, de la pollution et de la vie débordante jusqu'à l'envahissement. Auprès de Somaya, ils pansent leurs plaies en se remplissant la panse.

Dans les maisons traditionnelles égyptiennes, le fasahat est la pièce où se réunissent les invités lors des fêtes. Si Somaya a choisi ce nom, c'est parce qu'elle veut «que les gens se sentent comme chez eux». D'un bouge, elle a fait un palace miniature : trois tables soigneusement dressées, des banquettes confortables et de discrets luminaires, si rares dans ce pays où le néon jaunissant fait loi. Sur un mur, des photos noir et blanc relatant des scènes de vie du siècle passé, sur un autre des autocollants révolutionnaires vantant l'insoumission et la liberté. Une vieille radio crache les tubes des grands de la chanson arabe : Fairouz, Oum Kalsoum, Abdel Halim Hafez. Mais nulle trace de la casquette du général Al-Sissi ou de la barbe de Morsi, président déchu, pourtant si représentées dans les autres échoppes. «Je n'aime ni l'un ni l'autre», coupe-t-elle court.

D