Elle a commencé à 14 ans. Ses parents ne voulaient pas qu'elle fasse la même chose qu'eux. «Tripière, c'est pas un métier pour une fille, c'est trop fatigant», aimait à répéter son père, aujourd'hui à la retraite. Sandra Gamber, 36 ans, contredit : «J'ai toujours aimé ça.» Elle a commencé à «éplucher» des onglets à 7 ans. Eplucher ? Enlever le nerf du milieu, puis ouvrir en steak. «La technique, ce n'est pas compliqué, explique-t-elle. Il faut savoir où sont les nerfs. Chaque morceau a sa méthode d'épluchage, pour que ce soit le plus simple et pour en enlever le moins possible.» Première évidence : cet art de l'économie est essentiel dans la triperie, qui s'intéresse au «cinquième quartier», comme disent les bouchers, c'est-à-dire aux morceaux qui ne sont pas directement rattachés aux quatre quartiers - deux pour l'avant et deux pour l'arrière - de la carcasse du bœuf, du veau, de l'agneau ou du porc.
Sandra est là, pimpante, à 7 heures du matin, dans la halle des Coudreaux du marché de Montfermeil (Seine- Saint-Denis). Un petit marché de village où tous les commerçants se connaissent et où fleurissent une quinzaine d’étals. On s’interpelle d’allée en allée, on se salue, on se demande des nouvelles. Il y a des légumes à côté, une boulangère qui installe ses baguettes et ses miches, une boucherie chevaline juste en face : comme les tripiers, c’est un métier devenu rare sur les marchés. Pourtant, ça fait des lustres qu’on lave, qu’o