Le chocolat est devenu légèrement schizophrène: produit industriel de grande consommation, il est aussi passé ces dernières années entre les mains de quelques génies sucrés qui en ont fait une denrée de luxe réservée aux beaux quartiers.
L'an dernier, le chef multi-étoilé Alain Ducasse s'est à son tour lancé dans le cacao haut de gamme, mais pas sur le même mode que les chocolatiers/pâtissiers Jean-Paul Hévin, Patrick Roger ou Pierre Hermé. A Paris, sa chocolaterie est installée dans une rue qui, à défaut d'être populaire, n'est pas encore bourgeoise. Et sa décoration, d'inspiration industrielle, diffère des boutiques-écrins développées par la concurrence, où des rivières de diamants pourraient fort bien se substituer aux pralinés. Une singularité qui a sa raison d'être : cette chocolaterie de Bastille est un atelier où l'on peut observer toutes les étapes de la transformation du cacao. «Je n'avais aucune légitimité dans ce domaine, explique Alain Ducasse. Pour être crédible, il fallait prouver que ce n'était pas une histoire de co-branding où j'aurais utilisé mon nom pour vendre un produit. Plutôt montrer au client ce qu'on fait, et pourquoi on le fait.»
Le présentoir des ganaches. Photo Samuel Guigues
La rue de la Roquette est plus fréquentée par les noctambules éméchés que par les fins gourmets. Pourtant, la chocolaterie se trouve bien là, entre un vendeur de fripes et une crêperie-falafel, au fond d’une pittoresque cour intérieure digne d’Amélie Poulain. L