La première fois qu’on l’a croisé, il était franchement en mauvaise posture. Il venait de se gaufrer dans un fossé au volant d’une antique Ford Taunus. Son tarare était juste là, blotti dans l’herbe, maculé de boue, les deux roues du côté droit pataugeant dans une fange fétide. Et notre homme, stoïque, était resté au volant, raide comme la justice mais penché comme un tuteur pour haricots à rame après un orage d’été. Le panorama était d’autant plus comique, vu à travers la lunette arrière où se détachaient les deux énormes feuilles de choux dont était pourvu le chauffard.
On fit le tour de son carrosse avec précaution tandis qu'il baissait la vitre de sa portière. Il nous interpella comme si on venait de fréquenter le même abreuvoir : «Me voilà, pas rendu, hein ?» qu'il fit. On confirma d'un hochement de tête songeur. «Si, au moins, je pouvais m'extraire, qu'il dit en haussant les épaules. Même Gagarine, il était mieux barré dans son Spoutnik.»
Il est vrai que question alunissage, c'était plutôt raté. Alors, on conseilla à notre héros de la cité des étoiles de se tenir coi le temps qu'on aille braquer un Massey Ferguson ou un John Deere, histoire de le sortir de la panade intersidérale. «Vous croyez que vous en trouverez un ?» qu'il angoissait le Robinson de Baïkonour-sur-Bresse. T'inquiète mon colon, qu'on lui dit en substance, on débusquerait un Farmall de chez Mac Cormick dans la toundra.
Godzilla. Une demi-plombe plus tard, on est don