C'est bien notre veine que notre fillotte soit tombée amoureuse comme on vous l'a raconté la semaine dernière en goûtant ses cookies (Libé du 20 novembre). Vous savez comment sont les pères, ils veulent tout savoir. Alors voilà ce qu'elle nous a écrit sur un coin de la table de la cuisine :
«Je suis tombée amoureuse de toi dans le dernier TGV du samedi soir. Autant dire par accident, tellement rencontrer l’homme de ma vie dans ce train m’aurait semblé improbable auparavant. Je le prenais pour voyager en paix car les rares passagers égarés dans cette rameunique me semblaient toujours taiseux et résignés. Je m’étais installée côté couloir d’un carré à quatre places en compagnie de deux loups solitaires qui s’étaient endormis après une cure de Kinder Schoko-Bons. En face de moi, une petite chouette perchée sur son siège, habillée de jacquard, picorait consciencieusement des champignons de Paris et des feuilles de mâche joliment disposés dans un Tupperware. Elle mangeait avec autant de soin que si elle avait dressé la table sur le guéridon de son salon. J’admirai cette aura d’intimité qu’elle avait réussi à installer dans ce décorum ferroviaire sans grâce. Moi qui n’étais jamais allée plus loin qu’Ikea pour meubler mes intérieurs avec une absence de conviction qui n’avait rien à envier au nomadisme masculin. C’était les hommes qui, le plus souvent, s’étonnaient de mon peu d’empressement domestique. J’avais beau leur faire remarquer que les femmes n’avaient plus le monopo