Début octobre, le numéro 2 mondial de la bière, SABMiller, a accepté de se faire acheter par le numéro 1 du secteur, le belgo-brésilien AB InBev, pour l'équivalent de 96 milliards d'euros. On estime qu'une fois fusionné, le groupe servira une bière sur trois dans le monde. Pas très réjouissant pour ceux que l'idée de boire une cervoise standardisée n'enthousiasme pas outre mesure. Mais il est toujours temps de se tourner vers les bibines artisanales, et l'excellent «mook» Omnivore, sorti début octobre, consacré à ce sujet.
«Nous buvons bien ce que nous sommes. Et nous avons encore le choix», affirme à raison dans son édito Luc Dubanchet, le fondateur d'Omnivore (et ancien collaborateur de Libération). Et en effet, la puissance des grands groupes n'a heureusement pas empêché la prolifération récente de microbrasseries en Europe, et particulièrement en France, où 90 nouveaux établissements ont vu le jour en 2014 (on en compte 700 en tout). Omnivore lutte contre l'idée préconçue selon laquelle la bière ne serait pas glamour, tout juste bonne à désaltérer des types bedonnants qui descendent des pintes comme de l'eau.
Ce numéro se charge de redonner ses lettres de noblesse à l’un des alcools les plus plaisants au monde, d’abord en présentant une intéressante sélection de vingt bouteilles qui témoignent de la diversité de son goût : la 3Ter, de la brasserie de la Goutte d’or, une triple au café puissante et maltée qui se révèle aussi acide et sucrée ; l’Indigo Pale Ale, de Deck & Donohue, très orientée sur le fruit ; ou encore Chapitre 13, de la brasserie la Débauche, une bière de couleur noire très peu alcoolisée, fraîche et légère.
Ces belles bouteilles montrent aussi que le temps des étiquettes moches avec lettres gothiques et gargouilles est révolu. Comme pour le vin nature, on observe un effort de présentation, une vraie diversité qui pique la curiosité.
En outre, le magazine consacre un article de fond à la «houblon generation», les acteurs de ces microbrasseries en ébullition, les bars ou boutiques où aller faire ses emplettes à Paris et en Province. Les plus téméraires pourront suivre les recettes de cocktails à base de bière proposées par des mixologistes réputés pour leur créativité - où l'on apprend que la bibine se marie à merveille avec le calvados au gorgonzola, la sauce Worcester, le bourbon, le sirop d'orgeat ou le blanc d'œuf. Pas tout en même temps, naturellement.