Hier, notre aminche Kim a fait ses fonds de placard pour nous mitonner une réconfortante soupe de pois cassés. Aujourd'hui, nous, on fait les fonds de tiroir longtemps amnésiques qui sont un mixte entre la caverne d'Ali Baba et le Mont-de-Piété. Entre la roulette en buis pour découper la pâte à beignets, la cuillère en bois dénichée il y a trente ans au souk de Mossoul (Irak), la cuillère à miel et le couteau désosseur, on a retrouvé notre bonne vieille râpe à tout faire avec laquelle on entretient des relations contrastées. On est un peu comme un vieux couple, elle et nous, un mélange d'amour, d'habitudes et de détestation. On la cajole quand elle nous sert à râper un voile de parmesan sur les spaghettis. On peste contre elle quand elle nous fait transpirer sur une montagne de carottes râpées. Mais, bon, on lui a juré fidélité en faisant le serment de ne jamais céder à la tentation du robot ménager qui l'aurait envoyée à la casse.
Concertos culinaires
Alors à l’ère du confinement, on se dit que notre râpe va connaître le plein-emploi. Car on a tout notre temps et de l’huile de coude à revendre pour jouer de la râpe et des autres ustensiles de cuisine à main : hachoir, moulinette, mandoline, presse-purée, etc. C’est aussi l’occasion idéale de jouer des concertos culinaires à plusieurs doigts avec le renfort des mouflets, de pépé et de toute la smala sous cloche. En prenant soin de se laver les mains, c’est essentiel.
Cuisine russe
Pour se mettre en jambes, on a revisité le très beau et bon voyage dans la cuisine russe (1) de Pavel Spiridonov et Nicolas Delaroche. Du borchtch au gâteau Kiev en passant par la kacha de maïs farcie au poulet, Pavel Spiridonov nous fait découvrir les goûts de son enfance passée à Saint-Pétersbourg. Pour jouer de la râpe, on a choisi sa recette de draniki, des galettes de pommes de terre, originaires de Biélorussie. «Dans cette recette, les quantités sont suffisantes pour une personne – voire pour deux si vous êtes d'humeur partageuse, explique l'auteur. Comme vous le constaterez vous-même, ces draniki se mangent très facilement et très rapidement, nature, avec de la crème fraîche, ou encore avec une tranche de fromage. Ils peuvent aussi servir d'accompagnement pour un rôti ou du poulet.»
Pour deux personnes, il vous faut : 500 g de pommes de terre farineuses ; 1 œuf ; 200 g de crème fraîche ; une demi-cuillère à café de sel ; de l’huile de tournesol ou de colza pour la cuisson.
Allez, aux fourneaux avec Pavel Spiridonov : «Lavez et pelez les pommes de terre – pour que les pommes de terre pelées ne brunissent pas, je les plonge dans l'eau froide. Râpez-les à l'aide d'une râpe fine. Ajoutez-y un œuf et le sel, puis mélangez le tout. Les draniki doivent avoir un goût légèrement salé. Goûtez les premiers et ajoutez du sel si besoin. Si comme moi, vous achetez souvent des pommes de terre sans regarder l'étiquette et que vous vous retrouvez avec une variété peu farineuse, ajoutez une cuillère à soupe de fécule de pomme de terre. Préchauffez la poêle sur feu moyen, versez-y un filet d'huile et déposez votre pâte. Pour une galette, comptez une cuillère à soupe d'huile. Etalez légèrement la pâte et laissez-la cuire. Quand les draniki deviennent bien dorés dessous et presque cuits, retournez-les et finissez la cuisson. A mesure qu'ils sont cuits, placez les draniki dans un plat à hauts bords allant au four. Badigeonnez chaque couche de draniki avec de la crème fraîche. Environ deux «poêles» avant la fin, allumez votre four à 180 degrés. Une fois que tous les draniki sont cuits, mettez votre plat au four pour trente minutes environ.»
(1) «La cuisine russe, recettes pour tous les jours» de Pavel Spiridonov, photographies de Nicolas Delaroche. (Les éditions Noir sur Blanc, 19 euros, 2018). En attendant que nos ami·e·s libraires puissent rouvrir, ce livre peut être notamment commandé sur le site https://www.lalibrairie.com