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Libération
Le temps des villes et des territoires: tribune

2024, «an I» de l’adaptation au changement climatique

Transition écologique : le temps des villes et des territoiresdossier
Par Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires.
Etang asséché aux abords de la Loire, entre Nantes et Angers. Photo de la série «Un climat français» de William Daniels, issue de la Grande commande photographique de la BNF. (William Daniels/Grande commande photojournalisme)
par Christophe Béchu
publié le 12 mars 2024 à 10h36

Adapter la nation aux effets du dérèglement climatique est une nécessité pour préserver notre prospérité, nos libertés et notre puissance dans un monde qui change. C’est pour moi, depuis mon arrivée au ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, une priorité politique. Quand j’ai affirmé il y a un an que notre pays devait se préparer à un réchauffement de +4 degrés à la fin du siècle, sans renoncer à nos ambitions en matière de baisse de nos émissions de gaz à effet de serre, l’accueil a été rude. On m’a accusé de défaitisme, d’abandon, de renoncement.

Un an plus tard, la donne a changé. Malheureusement, nous sommes aidés par les événements. Les effets du dérèglement climatique sont devenus beaucoup plus évidents pour chacun d’entre nous.

Notre pays change sous nos yeux

Evidents bien sûr en termes d’événements climatiques extrêmes. L’été 2022, marqué par une sécheresse record, restera comme un électrochoc dans notre rapport collectif à la ressource en eau. L’automne 2023, marqué par une série de catastrophes qui ont frappé durement nos concitoyens, notamment dans le Pas-de-Calais, restera comme le moment où nous avons pris conscience de la fragilité de certains territoires et de la nécessité de moderniser nos systèmes de prévention et de protection.

L’autre évidence, c’est qu’au-delà des événements climatiques extrêmes, notre environnement et notre pays commencent à changer sous nos yeux. A long terme, ces mutations de nos terroirs et de nos paysages vont profondément affecter notre identité. Mais à moyen terme, c’est notre organisation sociale et économique qui va devoir s’adapter. La montagne, par exemple, doit se préparer dès aujourd’hui à l’après-neige. Les cycles agricoles sont déjà affectés en profondeur : la date des vendanges a lieu deux semaines plus tôt qu’il y a vingt ans en Champagne et, à Mirecourt, dans les Vosges, les semis de blé sont effectués un mois plus tôt qu’en 1970. Des territoires et professions particulièrement vulnérables au changement climatique vont devoir être accompagnés massivement dans leur démarche d’adaptation.

L’Etat ne peut pas tout

Face à cette double évidence, un an après mon cri d’alerte, l’adaptation au changement climatique est devenue un sujet politique. C’est une excellente nouvelle. Le président de la République a été le premier titulaire de sa charge à évoquer en janvier 2024 la nécessité de l’adaptation. Le Premier ministre a fait de ce sujet une ligne de force de son action en matière environnementale. Sous leur autorité, j’ai coordonné l’élaboration d’une stratégie publique inédite : le Plan national d’adaptation au changement climatique (Pnacc), dont la première version paraîtra dans quelques semaines. C’est notre responsabilité politique : si la baisse des émissions est mondiale, le chantier de l’adaptation est national. Personne n’agira à notre place.

Le Pnacc, ce sont des dizaines de mesures pour adapter nos villes, nos bâtiments, nos écoles, nos services publics, nos infrastructures, nos entreprises. Avec ce plan, l’Etat réapprend la grammaire du temps long, de la stratégie, de la planification pour protéger nos concitoyens et nos territoires. Mais en la matière, comme en toute matière, l’Etat ne peut pas tout : l’adaptation concerne nos modes de vie, notre quotidien, nos vacances et notre travail, notre façon de bâtir et de nous nourrir. L’adaptation, c’est donc aussi un défi démocratique et je lancerai dans quelques jours une consultation publique très large sur notre stratégie d’adaptation. 2024 doit être le point de départ de cette conversation nationale, pour construire ensemble une nation plus résiliente et plus forte dans un monde qui se réchauffe.