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Libération
24h de Libé

50 ans de «Libé» vus par… Bertrand Mandico : le journal «n’a jamais cessé de porter en lui cette idée de contre-culture»

Le cinéaste et plasticien français Bertrand Mandico est venu à «Libé» pour son esprit «un peu punk» et il est resté, par amour, notamment, pour les pages Culture.
publié le 11 novembre 2023 à 14h30

Pour ses 50 ans, Libé s’installe ce samedi 11 novembre à la Cité de la Musique pour 24 heures de festival. Au programme : débats et rencontres pour décrypter l’actualité, découvrir les coulisses du journalisme et réfléchir à la marche du monde. Mais aussi des masterclass, des spectacles vivants et des concerts…

Quand je suis venu faire mes études à Paris, au tout début des années 90, j’ai fait la connaissance d’un garçon qui s’était engagé dans l’armée et a ensuite déserté. Il était donc en fuite, recherché par la police. Et chaque fois que je tombais sur lui, il avait un exemplaire de Libération glissé dans la poche arrière de son jean. Je trouvais ça à la fois terriblement sexy et très revendicatif. C’est ce qui m’a poussé à lire le journal. C’est avec les pages culture que s’est vraiment développé mon amour pour ce quotidien. Les pages cinéma, notamment les chroniques de Louis Skorecki qui me déconcertaient et me fascinaient à la fois. Je me suis très vite attaché aussi aux nécrologies – ce sont généralement les numéros que je garde. Je me souviens de la mort simultanée de Michelangelo Antonioni et Ingmar Bergman, de celle de Gainsbourg, de Liz Taylor…

Certaines légendes liées au journal jouaient également dans cette fascination, notamment sa collaboration en 1977 avec le collectif Bazooka que j’adorais et que Serge July avait supposément engagé après qu’il s’est introduit dans les locaux pour pirater le journal. Ça participait à cet esprit un peu punk dans lequel je me retrouvais complètement. Il m’est arrivé d’être ponctuellement agacé par des papiers sur des films ou des personnalités politiques, que je ne trouvais pas assez radicaux, trop indulgents ou, plus généralement, par la réduction du nombre de pages. Mais j’ai rarement été déçu par Libération, dont je n’ai jamais décroché car il n’a jamais cessé de porter en lui cette idée de contre-culture et a toujours eu une dimension queer. C’est, je crois, ce qui lui a permis de se réinventer, de tenir dans le temps.