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50 ans de «Libé» vus par… Franz-Olivier Giesbert : «Il y a moins de surprises qu’avant»

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Ancien directeur du «Nouvel Obs», Franz-Olivier Giesbert est passé ensuite par le «Figaro» et le «Point». A ses yeux, après des débuts foutraques et des excès, «Libé» a été «gagné par l’esprit de sérieux».
publié le 11 novembre 2023 à 19h30

Pour ses 50 ans, Libé s’installe ce samedi 11 novembre à la Cité de la Musique pour 24 heures de festival. Au programme : débats et rencontres pour décrypter l’actualité, découvrir les coulisses du journalisme et réfléchir à la marche du monde. Mais aussi des masterclass, des spectacles vivants et des concerts…

Ancien directeur du Nouvel Obs, Franz-Olivier Giesbert est passé ensuite par le Figaro et le Point. Soit toute la panoplie du concurrent parfait, entre l’hebdomadaire cousin, le quotidien de l’autre bord et le journal considéré comme proche de la pensée de Raymond Aron, créé six mois avant celui fondé par son rival Jean-Paul Sartre. Qu’est-ce que ça lui évoque, Libé ? Les titres, forcément. «Il y a eu une période de titres très accrocheurs, un peu drôles, qui claquaient, et qui pouvaient susciter chez moi une forme d’envie, voire de regret», avoue le septuagénaire. Ah, de la jalousie, enfin ! Noble sentiment du concurrent. L’autre souvenir de FOG, c’est le «Sublime, forcément sublime» de Marguerite Duras, l’article sulfureux sur l’affaire Grégory accusant la mère, Christine Villemin, et publié dans Libé en juillet 1985. «J’aimais beaucoup Duras mais j’ai été très choqué à l’époque par son article. Ça m’a beaucoup fait réfléchir sur l’espèce d’impunité accordée à la littérature.»»

Pas de cousinage cependant, selon Franz-Olivier Giesbert, entre Libé et le Nouvel Observateur des années 70 : «Il y avait plus de courants idéologiques chez nous, des maoïstes, mais aussi des chabanistes, des mendésistes… A l’intérieur de Libé, ça ne pensait pas tellement différemment. Et ce n’était pas le même type de lectorat, le nôtre avait plus l’esprit de sérieux.» Quand il arrive au Figaro, à la fin des années 80, il trouve cependant dans sa nouvelle rédaction une tendance, «comme dans une grande partie de la presse française», à s’inspirer des méthodes de Libération. «Mais moi, j’avais plutôt en tête les modèles du New York Times, de la Repubblica ou d’El País…»

Dans le quotidien de Robert Hersant, «pas d’animosité» pour le journal d’en face, au contraire : quotidien du matin, contrairement au Monde, les journalistes ont plutôt tendance à ouvrir mécaniquement Libé au moment de discuter des sujets du jour en conférence de rédaction. «Et je luttais contre ça ! C’était une période où on sentait que Libé pouvait s’imposer et devenir un journal structurant, raconte FOG. Robert Hersant le considérait comme le grand concurrent potentiel. Et puis il a raté ce truc de devenir un quotidien majeur, ce qui paraissait pourtant inéluctable. Quand il a changé sa formule pour Libé 3 en devenant un journal attrape-tout, les lecteurs ont eu le sentiment qu’il allait perdre son ADN.» Lit-il encore Libé aujourd’hui ? «Je picore. Ce que je reprocherais aujourd’hui, c’est qu’il y a moins de surprises qu’avant. C’était un journal qui changeait souvent d’avis. Aujourd’hui, moins. Il a été gagné par l’esprit de sérieux.