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Libération
Reportage

A Avignon, la bibliothèque Renaud-Barrault fait sa promotion canopée

La Biennale d’architecture de Venisedossier
La réhabilitation du lieu est une étape de plus vers la rénovation urbaine du sud de la ville. Derrière les portes : toiture en bois végétalisée, structure en menuiserie et meubles mobiles.
La Canopée de la bibliothèque Renaud Barrault par Jakob+Macfarlane, en automne 2024. (Roland Halbe/Jakob+Macfarlane)
par Caroline Delabroy, Envoyée spéciale à Avignon
publié le 9 mai 2025 à 10h37

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Du centre-ville d’Avignon, le tramway suit l’extérieur des remparts, traverse les faubourgs puis s’engage sur la rocade. Il faut à peine une quinzaine de minutes pour rejoindre la bibliothèque Renaud-Barrault, équipement totem posé le long de la voie rapide dans ce quartier populaire du sud de la ville en pleine rénovation urbaine. Dès l’entrée, l’acoustique se fait tout autre : le bruit de la circulation cède la place à une douce atmosphère. Le regard, lui, est attiré par le bois. Tel un arbre bordé de rayonnages, une structure en menuiserie déploie ses branches et invite à gravir les escaliers, au gré des livres posés dans le tronc. «C’est l’arbre de la connaissance mais aussi l’idée de l’arbre à palabres, un lieu où l’on se retrouve, se rassemble, un lieu intergénérationnel où tisser du lien», aime à dire l’architecte Dominique Jakob, de l’agence Jakob+MacFarlane qui signe la réhabilitation de la bibliothèque, réouverte au public en novembre dernier après deux ans et demi de travaux.

De la structure originelle, les architectes ont fait le choix de garder tout le béton et d’en donner une nouvelle lecture. «Dans tous nos projets, nous essayons d’être très clairs entre ce qui était là et ce que l’on ajoute, cela permet de se situer dans les histoires, expliquent-ils. C’est aussi l’histoire du quartier, quelque chose qui résonne ici pour les familles.» Inaugurée dans les années 80, et vite surnommée le «Beaubourg avignonnais» pour ses couleurs vives et ses lignes futuristes, la bibliothèque a longtemps été le seul équipement culturel extra-muros d’Avignon. «Des rénovations comme celles-ci permettent de rappeler qu’il y a aussi un patrimoine du XXe siècle à valoriser», souligne Cécile Helle, maire (PS) d’Avignon, ville classée à l’Unesco pour le palais des Papes et son patrimoine historique.

Devenu une «véritable passoire thermique», la rénovation du bâtiment s’imposait. Poursuivant l’idée de l’arbre, l’agence d’architecture a imaginé une «canopée» coiffant l’édifice. Cette toiture en bois végétalisée «réduit l’apport en chaleur sur le bâtiment» et joue un effet casquette, le protégeant à la fois du soleil et de la pluie. Elle supporte aussi des panneaux photovoltaïques pour une meilleure autonomie énergétique de la bibliothèque.

Mobilier modulable et sur roulettes

«Le béton qui était là, le bois que l’on a amené, et question matériaux c’est à peu près tout», sourit Dominique Jakob. A l’intérieur, le parti pris architectural a été de décloisonner, d’ouvrir les espaces pour conférer à la bibliothèque l’identité de «tiers-lieu culturel» voulu par la ville. «C’est l’évolution quasi naturelle des bibliothèques, entre la révolution numérique, la transformation des besoins et des usages, et le fait que dans une ville il ne reste plus beaucoup d’endroits où les gens peuvent se réunir au quotidien», explique Jérôme Triaud, directeur d’Avignon bibliothèques.

L’espace peut facilement évoluer, avec un mobilier modulable et sur roulettes. La bibliothèque Renaud-Barrault abrite aussi une ludothèque, un lieu dédié aux enfants, une salle de jeux vidéo, des petites salles à réserver pour réviser en groupe le bac ainsi qu’un bel auditorium. Des poufs de couleurs sont disséminés un peu partout, l’un des étages accueille même un hamac. Des machines à café doivent bientôt être livrées. Côté collections – près de 25 000 documents sont disponibles.

Les plus jeunes sont encore à l’école ce jour-là. Attablées, quatre lycéennes chuchotent et mettent la dernière main au carnet sur leur voyage scolaire en Finlande qu’elles doivent présenter le lendemain. «C’est plus grand qu’avant les travaux, c’est bien pour travailler», glissent-elles, se promettant de revenir. Près de l’accueil, elles pourront lire les rendez-vous de la semaine annoncés sur le panneau ardoise : atelier «Fabrique ton film», soirée livres, concert de musique du monde et d’autres encore à venir.