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Climat Libé Tour Dunkerque

A Dunkerque, un air pas si pollué que ça

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Même si l’agglomération comprend notamment plusieurs sites industriels et un important trafic maritime et autoroutier, les vents aident à maintenir les valeurs dans la moyenne.
Vue du beffroi de Dunkerque. (Richard Soberka/Hemis via AFP)
par Stéphanie Maurice, correspondante à Lille
publié le 10 octobre 2023 à 17h02
Energie, transports, rénovation durable, végétalisation… En 2023, «Libé» explore la thématique de la transition écologique lors d’une série de rendez-vous inédits. Objectif : témoigner des enjeux et trouver des solutions au plus près des territoires. Quatrième étape à Dunkerque, les 13, 14 et 15 octobre.

A Dunkerque, la qualité de l’air est moyenne, pendant la majeure partie de l’année, selon les indices publiés par Atmo Hauts-de-France, l’association chargée de sa surveillance. Un résultat correct pour une agglomération qui condense les sources de pollution atmosphérique : deux autoroutes, l’A16 et l’A25 ; un transport maritime dense ; quatorze sites Seveso seuil haut, dont le complexe sidérurgique d’ArcelorMittal, le plus gros émetteur industriel régional d’oxyde d’azote, d’oxyde de soufre et de poussières. C’est ce qu’affirme la Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement des Hauts-de-France dans son bilan annuel.

Dépassements réguliers des normes par ArcelorMittal

L’oxyde d’azote est à l’origine des pollutions à l’ozone pendant l’été, un fort irritant des voies respiratoires et les poussières contiennent des particules fines, les PM10 pour les plus grosses, les PM2,5 pour les plus petites, dangereuses pour les poumons. «Dire que l’air n’est pas pollué à Dunkerque n’est pas vrai, mais il n’est pas plus pollué qu’ailleurs», remarque Yann Landkocz, chercheur en toxicologie à l’université du Littoral-côte d’Opale, également conseiller municipal de Dunkerque délégué à la qualité de l’air. Ce qui est exact : l’agglomération se situe dans la moyenne régionale, confirme Atmo Hauts-de-France. Même si une enquête conjointe de Disclose et de MarsActu en mars a dénoncé des dépassements réguliers des normes réglementaires d’émissions pendant l’année 2022 de la part d’ArcelorMittal – ce qui a provoqué le dépôt d’une plainte par l’association France Nature Environnement. L’entreprise se défend en parlant de «phénomènes épisodiques et limités dans le temps».

Avec des résultats lissés sur l’année, les capteurs d’Atmo Hauts-de-France n’ont constaté aucun franchissement de la limite réglementaire de ces différents polluants : les émissions sont dans les clous, mais ne respectent pas cependant le seuil sanitaire recommandé par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Exemples des particules les plus fines, les PM2,5 : elles restent certes au-dessus des valeurs OMS, mais on constate 35% de baisse moyenne des concentrations en dix ans. Ce résultat est dû aux efforts des industriels pour améliorer leur process de fabrication et la filtration de leurs rejets, aux transports urbains plus propres, bus au gaz ou voitures électriques.

Augmentation des pics de pollution à l’ozone

Cependant, l’agglomération dunkerquoise garde sa spécificité : ses pollutions sont massivement d’origine industrielle, au contraire de la métropole lilloise, où les particules fines émanent du trafic routier et du chauffage au bois. Dunkerque paye aussi le prix de son développement portuaire : le fuel lourd utilisé par les vraquiers, porte-containers et autres mastodontes dégage, entre autres substances, de l’oxyde d’azote, ce qui est une préoccupation, avec l’augmentation des pics de pollution à l’ozone, constaté dans toute la France, à cause du réchauffement climatique (+ 17 % en dix ans à Dunkerque). «L’avantage que nous avons ici, ce que nous avons des vents qui ont tendance à disperser ces polluants», reprend Yann Landkocz. Idem pour la pluie, qui les plaque au sol. Le chercheur en sourit : «Je préfère vivre ici avec ce balayage constant qu’en région parisienne.»