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Libération
Essai

A la découverte des «Médecins des sommets»

Alpiniste accompli, Pascal Sancho nous embarque en haute montagne, environnement hostile et sublime où les équipes de secouristes ont fort à faire. Ce récit minutieux donne vie aux sentiments extrêmes qui éclosent face à l’adversité.
L’hélicoptère jaune et rouge, qui, inlassablement, fait tourner ses pales pour aller chercher les gens dans la tourmente. (Chris Tobin/Getty Images)
publié le 30 septembre 2023 à 3h16
(mis à jour le 22 novembre 2023 à 12h41)

Par-delà les cimes. Médecins des sommets se présente comme une chronique précise du secours en montagne. A chaque page, on croise «le Doc» dans ses œuvres, qui doit aller vite, être précis dans ses gestes, faire avec l’environnement vertical… Et puis, aussi, l’hélicoptère jaune et rouge, qui, inlassablement, fait tourner ses pales pour aller chercher les gens dans la tourmente.

«L’alerte est parvenue au poste de secours en montagne un peu plus tôt dans la matinée. Un surfeur a visiblement confondu vitesse et précipitation en quittant prématurément la piste balisée pour s’engager dans une pente raide que les affres du soleil avaient tenu à déneiger. Désarticulé comme un pantin, son corps gît sur un modeste replat […]. Il est inconscient, il respire, pouls à 110», explique un secouriste de l’Alpe d’Huez. Le temps se gâte. Le Doc a besoin de «vingt minutes». Lors d’une intubation, les risques de dégradation sont nombreux, et c’est avec soulagement qu’il accompagne l’arrivée de la civière dans l’habitacle de l’hélicoptère.

Mais lorsque c’est l’hélicoptère des secouristes qui s’écrase, une autre histoire se noue. «Choucas 65 vient de se crasher au Vignemale ! Il leur faut un médecin. Ce n’est pas bon, ce n’est pas bon […]. Ils étaient en entraînement. Le gardien du refuge aperçoit la machine au pied du couloir de Gaube… Moment irréel et glaçant ! Pour Sophie, le sol s’effondre sous ses pieds, la montagne gronde et son esprit vacille, partagé entre la réalité des faits qu’elle vient d’entendre et l’impossibilité d’y croire, tant la violence de la nouvelle paralyse la moindre réflexion.»

Ce qu’il y a d’intéressant avec l’écriture de Pascal Sancho, c’est que la profusion de détails sert à chaque fois l’explication de texte. «Serrer la sangle d’un crampon, vérifier que la vis de son mousqueton est bien fermée, échanger un regard simple et profond avant de poser une main rassurante sur la jambe […]. Pour échapper comme on peut, une poignée de secondes encore, à la misère humaine.»

Lecteur attentif, Jean Philippe Page, président de l’Association nationale des médecins et sauveteurs en montagne, a trouvé l’ouvrage «raccord avec la réalité. Il retranscrit bien ce partenariat pilote-secouriste-médecin, où chacun a ses prérogatives, comme une musique mise en œuvre pour que cela se passe au mieux. C’est aussi très réaliste, car Pascal Sancho décrit différentes émotions du secours. On passe un peu par tous ces sentiments quand on pratique.» Au final, un sentiment d’amitié et de solidarité qui traverse tout le livre. «On y pense quand on part en secours. L’activité est dangereuse, on est là pour veiller les uns sur les autres et prendre les bonnes décisions pour que cela se passe bien. Il y a une vraie communauté du secours en montagne», conclut Jean Philippe Page.

Par-delà les cimes. Médecins des sommets, de Pascal Sancho, Mareuil Editions, 206 pp., 20 euros. Une lecture à compléter en allant sur le site de l’Association nationale des médecins et sauveteurs en montagne (www. secours-montagne.fr)