Personne n’arrive à Ouessant par hasard. Ni les voyageurs de passage — entre 40 000 et 60 000 par an — ni les quelque 850 habitants qui y vivent à l’année. Parmi eux, la plupart y sont nés, enracinés depuis des générations ; d’autres ont débarqué plus récemment, attirés par une existence hors du temps. Bertrand et Mélanie disent, eux, qu’ils s’y sont «échoués», comme un morceau de bois sur une grève balayée par les vents. Pour l’homme à la chevelure indomptée et aux yeux couleur océan, la rencontre avec l’île remonte à son enfance, dans la maison de son grand-père où il venait passer ses vacances. Pour elle, qui a grandi loin des embruns, près des montagnes d’Annecy, le coup de foudre s’est produit l’été dernier. Bertrand lui a proposé de découvrir ce bout de terre au large du Finistère — le dernier éclat de France avant l’Amérique.
Depuis, les quadragénaires vivent en colocation dans la grande bâtisse familiale, construite à l’image de l’île : sobre, robuste, et taillée pour résister à la puissance des éléments, omniprésents dans le quotidien des insulaires. Les deux amis sont là pour une durée indéterminée. «Je suis mieux ici qu’ailleurs, confie-t-il, attablé dans son jardin verdoyant tourné vers l’océan. Et puis, une fois qu’on a vécu au rythme d’Ouessant, c’est difficile de faire marche arrière, de se réadapter à une vie ”normale”.»
«La nature impose son rythme»
Pas besoin même de poser le pied sur Ouessant pour sentir son caractère unique. Le dépaysement commence dès l’emba