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Libération
Les dix ans du Vrac: témoignage

Bio : «Je ne regrette pas le choix que j’ai fait»

Les dix ans du Vracdossier
Michel Delille, de «la ferme des Blancs Moutons», ne regrette pas d’avoir choisi une production 100 % biologique. Mais reste conscient des difficultés de la filière.
La ferme des Blancs Moutons est située entre Douai et Cambrai, à Arleux-Brunémont, dans le département du Nord.
publié le 28 juin 2023 à 4h11
Comment fournir une alimentation durable et de qualité à toutes et tous ? Enquêtes, portraits, témoignages et reportages... Un dossier réalisé en partenariat avec l’association «Vers un réseau d’achat en commun» à l’occasion de ses 10 ans.

«Je cultive des lentilles, des pois chiches, de l’ail, de la pomme de terre. On est une ferme bio depuis 2015. On cherche à vendre avec le moins d’intermédiaires possible. Notre objectif est d’en avoir deux. Nous sommes situés entre Douai et Cambrai, à Arleux-Brunémont, dans le département du Nord. Nous avons 85 hectares, 1090% bio. Mes parents donnent un coup de main et nous avons aussi un salarié. Mes parents ont commencé la conversion de la ferme en 2015. Mon père n’était pas un aficionado du pulvérisateur. On est dans un mode de production ou il n’y avait pas grand-chose à faire pour passer au bio. Les antilimaces, il n’en mettait plus, les antipucerons pareil. Il y a eu tout un cheminement, cela a créé des remous dans la famille. Aujourd’hui, même malgré la crise, je ne regrette pas le choix que j’ai fait.

«L’année prochaine ne devrait pas être meilleure. Le consommateur devra se responsabiliser aussi. J’ai des collègues qui ne veulent pas passer en bio, car le consommateur n’est pas là. Il faut expliquer aux gens qu’avec un budget même minimum, on peut en vivre. Je fais mes courses dans les Biocoop. Je suis devenu expert en recette de cuisine depuis qu’on fait de la vente directe. On a retrouvé le goût des pommes de terre, grâce à la culture de variétés locales. Je sais que le client a envie d’aller là-dessus. Les gens se régalent avec mes «chairs jaune peau rouge», et j’en vends à la pelle. Quant aux lentilles, les gens me disent : «Je déteste». Je prends deux poignées : «Tenez goûtez ! Et vous viendrez m’en rechercher j’en suis sûr !» Ils redécouvrent le goût, c’est sec, ils sont contents, on a fait partie des premiers à remettre de la lentille. Cela se vend bien.

«Pour l’ail, je suis le seul producteur IGP (1) en bio, les gens viennent chercher mon ail, même s’il est plus cher. J’ai décidé de vendre ma production plus localement. Une certaine catégorie de la population a conscience de la nécessité de mettre la priorité sur une alimentation de qualité. J’ai des smicards et aussi des gens avec une aisance financière, qui veulent avoir confiance dans ce qu’ils mettent dans leur assiette. Finalement, je ne peux pas dire que j’ai raison, ce sont les consommateurs qui le diront. Mais, intimement, je crois que je ne me trompe pas. Et puis, il y a des coccinelles, et je suis content !»

(1) IGP : l’indication géographique protégée est un signe d’identification de l’Union européenne qui désigne des produits dont la qualité ou la réputation est liée au lieu de production, de transformation ou d’élaboration.