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Tribune

Ce ne doit pas être «la fin du monde»

Ni déni ni naïveté dans ce titre accrocheur. Mais une volonté d’engagement et de résistance. Une tribune de Guy Chaumereuil, président et cofondateur du Grand Bivouac.

Grand Bivouac (Nicolas Nereau. Oya Communication)
Par
Guy Chaumereuil
Président et cofondateur du Grand Bivouac
Publié le 26/09/2025 à 10h32

Soyons francs : forts de nos «petits gestes pour la planète», nous sentions déjà que le compte n’y était pas pour contrer les premiers effets du réchauffement climatique. Face aux errements de Donald Trump, à la folie guerrière de Vladimir Poutine ou de Benyamin Netanyahou, à la souffrance exponentielle des peuples ukrainiens, palestiniens et de tant d’autres, nous voici définitivement affranchis : la distance entre notre petite personne, sa capacité d’agir et la violence du monde prend l’allure d’un gouffre au regard duquel celui de la dette publique française fait tout au plus figure d’un aimable nid-de-poule.

Qu’est-ce qui prend alors le Grand Bivouac - ce festival savoyard (dont Libération est partenaire) que nous avons créé voici vingt-quatre ans autour du film documentaire et du livre et qui enregistre désormais avec bonheur près de 30 000 entrées chaque année - de proclamer en cet automne 2025 que, finalement, «ce n’est pas la fin du monde Aurions-nous consommé trop d’amphétamines ou – pour éviter soupçons et polémiques – trop de jus de bouleau ?

Le programme de la prochaine édition détaillée par Jean-Sébastien Esnault, délégué général du Grand Bivouac

Ni déni, ni naïveté pourtant. Mais tout simplement une volonté d’engagement – un mot bien fort peut-être pour un festival – ou à tout le moins, le refus de renoncer.

Renoncer devant l’«Himalaya» des enjeux qui nous dépassent, ce serait d’abord nier les énergies toujours présentes chez l’humain – dont nous sous-estimons la conscience d’être, qui en fait la singularité - et plus largement encore de l’ensemble du vivant que nous écoutons mal ou n’entendons plus mais qui nous invite pourtant au temps long, à la trajectoire patiente, à la résilience à toute épreuve.

Renoncer, ce serait aussi insulter toutes celles et tous ceux qui se battent encore et toujours, sur chaque continent, pour leurs libertés, leurs droits, leur survie et leur vie. Il faut être à leur côté.

Baisser les bras, ce serait enfin nous priver de la puissance des images, des livres, de leurs autrices et auteurs, de la parole de toutes celles et tous ceux qui parcourent le monde et en portent témoignage. Ce serait occulter la force des philosophes, des scientifiques, des artistes aussi, qui tentent de donner un sens, une cohérence à ce que nous ressentons, nous pressentons.

Face à l’horreur qui progresse, cela parait bien peu. Mais rappeler sans faiblir l’essence même de l’être humain et la richesse intrinsèque du vivant, c’est conserver notre dignité et une âme de combattant. Le meilleur héritage à transmettre aux jeunes générations.