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Libération
Reportage

Dans le centre-ville de Marseille, où sont les arbres ?

Malgré un ambitieux «Plan arbres», le centre manque d’espaces verts. Des végétaux pourtant indispensables au rafraîchissement des villes.

Le parc du 26eme Centenaire à Marseille est un jardin public de 10 hectares aménagé sur l'ancien site de la gare du Prado. (Mario Fourmy/SIPA)
Publié le 08/10/2025 à 9h49

Jeunesse, transports, logement, biodiversité… En 2025, Libé explore la thématique de la transition écologique lors d’une série de rendez-vous gratuits et grand public. Objectif : trouver des solutions au plus près du quotidien des citoyens. Dernière étape de notre édition 2025 : Marseille, les 10 et 11 octobre.

Des rangées de palmiers portent leur jupe pour se protéger des papillons parasitaires. Au parc du 26e centenaire, dans le centre-ville de Marseille, ils symbolisent «l’esthétisme» dominant lors de sa construction aux débuts des années 2000 sur une ancienne gare ferroviaire de triage des déchets ménagers. Et qui avait «mal vieilli» selon Nassera Benmarnia, adjointe à la ville en charge des espaces verts, heureuse de parcourir les nouvelles allées plantées de mûriers, jujubiers, féviers d’Amérique et autres végétaux choisis sur «une liste établie par notre écologue d’espèces méditerranéennes supportant les grosses chaleurs». «Cela fait plaisir de rentrer dans un parc qui est vert», sourit-elle. L’été n’a pas connu d’arrêtés de sécheresse et il n’a pas fallu, comme lors d’années précédentes, négocier des dérogations «de bon sens» sur ce bassin-versant de l’Huveaune pour arroser en journée les arbres aux racines. «Si on veut une ville plus fraîche demain, il faut sauvegarder notre patrimoine existant, sinon ce ne sont que des mesures de greenwashing. Une fois un arbre planté, il faut trois ans d’accompagnement, d’arrosage régulier, pour qu’il prenne bien sa place.»

Sur les pentes, des ganivelles protectrices entourent les jeunes pousses : le parc s’est enrichi de 500 arbres et 35 000 arbustes dans le cadre de l’ambitieux «Plan arbres» de la ville qui, d’ici 2026, se fixe comme objectif de planter 308 000 arbres, arbustes et plants forestiers. Inutile de les chercher dans la rue, les plantations se font dans les 700 hectares de parcs, jardins et squares marseillais… partout là où la ville détient ce pouvoir vert. «En termes d’espaces verts, l’hypercentre de Marseille est le plus pénalisé, si l’on compare aux quartiers Nord et du sud de la ville et leurs anciens domaines bastidaires», relève l’élue. Cela n’a pas empêché la ville de préempter un terrain boisé sur les hauteurs des Aygalades, dans le 15e arrondissement, où le parc de l’Annonciade doit voir le jour. Dans le centre-ville, le parc Longchamp fait l’objet d’une opération de «renaturation», il en avait besoin.

Jardins plantés et invisibles

Au Vieux-Port, comme en bas de la Canebière, la végétalisation prend place dans de vastes jardinières à défaut de plantations en pleine terre. «La question de l’espace public n’est pas réglée», euphémise l’architecte Corinne Vezzoni dont les croquis d’un Vieux-Port ombragé de rangées d’arbres n’avait pas retenu les faveurs de la métropole lors de sa rénovation pour la capitale européenne de la culture en 2013 – on a pu les revoir lors de l’appel à contributions d’images lancé par la ville en juin dernier pour imaginer «Marseille demain».

«Mais on ne peut pas dire qu’il n’y a pas d’arbres à Marseille, relativise-t-elle. Quand on regarde les photos satellites, on voit bien les cœurs d’îlots, les jardins plantés et invisibles des rues, les anciens avaient quand même pensé ces questions-là.» Pour Marc Sureau, chercheur à l’Inrae (Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement) de Clermont-Ferrand, qui participe au projet Cooltrees sur le rafraîchissement des villes par les arbres, «la surface foliaire, la taille de la canopée» compte davantage que le nombre, de même que «la qualité du sol en termes de minéraux» et un «accès à l’eau suffisant» pour que les «arbres puissent transpirer». Sans oublier la désimperméabilisation des sols, car si l’arbre a le pouvoir de rafraîchir l’atmosphère en faisant de la vapeur d’eau, il ne sera jamais «un frigo» à lui tout seul.