Il travaillait à Sallaumines, dans une petite commune, à côté de Lens (Pas-de-Calais), où vivaient environ 1 500 jeunes de 18 à 30 ans. «Il n’y avait pas grand-chose à faire pour cette tranche d’âge. En 2014, on a donc créé une association, l’Avenir pour tous, dans le but de leur proposer un local et des activités», explique Christophe Morel, coordinateur et conseiller en insertion professionnelle d’initiative solidaire, qui a, avec d’autres, créé le garage solidaire du bassin minier.
Car ces jeunes avaient un gros problème de mobilité qui constituait un réel frein à leur insertion. «Ils ne peuvent pas toujours se financer le permis et quand ils l’ont, acheter ou entretenir correctement une voiture. Il nous fallait réfléchir à une solution pour que les gens qui n’avaient pas de moyens puissent se déplacer. On a donc créé ce garage associatif avec un atelier de réparation, la possibilité de louer des véhicules à un prix réduit [6 euros par jour, ndlr}, d’en vendre ou d’en prêter quand ils étaient en rade.» Le tout est ciblé sur des demandeurs d’emploi, des jeunes étudiants, des retraités ou des salariés à temps partiel qui disposent donc de peu de revenus. «On a tapé à la porte de différentes structures pour qu’ils nous financent, comme la Fondation de France ou l’agglomération Lens-Liévin. On a obtenu le label Euralens [qui récompense des projets d’excellence] et on a finalement pu ouvrir le garage en 2018 avec cette double vocation : retrouver de la mobilité et recruter des gens en insertion.»
«On sent les gens éprouvés»
L’association compte aujourd’hui 2 000 adhérents passés par ses services, et a remis une centaine de salariés en insertion (anciens détenus, personnes sujettes aux addictions, etc.) dans un emploi durable. «La gestion administrative nous prend le plus gros de notre temps, détaille Christophe Morel. On fait de l’accompagnement personnalisé, mais les contraintes administratives et budgétaires sont de plus en plus complexes. Le contexte socio-économique fait aussi qu’on a de plus en plus de sollicitations, des difficultés financières qui touchent nos adhérents. Depuis deux ans, on multiplie les demandes de colis alimentaire, on fait face aux problématiques de logements insalubres… Mais on n’a pas les moyens de répondre à toute la détresse sociale. On a du mal à répondre aux demandes d‘accompagnement social sur des sujets de plus en plus variés, comme l’endettement…» Conséquence, une perte de motivation chez certains salariés. «On sent les gens fatigués éprouvés et excédés par la situation, ce qui rend le travail difficile.»
Le garage solidaire se veut également à la pointe en matière environnementale. «Tout est recyclé, les déchets transformés en mobilier urbain. On a des projets de “surcyclage”, dans lesquels on donne une seconde vie aux déchets. On fait du décalaminage, de la conversion voiture essence en éthanol. On a mis en route un atelier vélo et on développe la pratique en milieu scolaire ; c’est une grosse partie de notre projet.»
Pour le futur, Christophe Morel souhaite élargir les partenariats dans la formation professionnelle, accompagner le public dans les secteurs du logement ou de l’aide alimentaire. «Il y a beaucoup de besoins ici», conclut sobrement le fondateur du garage solidaire.