Initiative citoyenne, le Festival des Idées organise, du 4 au 6 juillet à la Charité-sur-Loire, plus de 30 rendez-vous pour débattre des défis culturels et politiques de demain. Un événement dont Libération est partenaire.
Nous vivons une période de grande instabilité – en France, en Europe, dans le monde. Face aux guerres, à l’inflation, aux bouleversements technologiques, un sentiment d’incertitude s’installe. Cette nouvelle donne mondiale favorise l’agenda de l’extrême droite et de ses nouvelles alliances avec les forces économiques réactionnaires. Ils en sont pour le moment les instigateurs et les bénéficiaires.
C’est d’abord l’état de droit et nos démocraties qui se retrouvent de plus en plus à risque, mais cela concerne aussi les conditions futures de l’habitabilité de notre planète. Le climat, l’une des cibles premières de l’agenda réactionnaire, devient un terrain d’affrontement avec les «élites» – et un vecteur de désinformation et d’ingérences étrangères. Ce fut le cas lors des manifestations agricoles de début 2024, où se sont activés les trolls russes aux côtés de l’extrême droite.
Les élites réactionnaires tentent en réalité d’imposer un agenda au reste de la population, d’abord en essayant d’affaiblir l’Etat et de délégitimer celles et ceux – associations, chercheurs, citoyens – qui œuvrent pour un avenir plus juste et plus durable. C’est un «backlash» venu d’en haut qui se propage avec des narratifs similaires dans de nombreux pays européens.
Une des priorités des Français
Cet agenda médiatique contamine trop rapidement les prises de décision avec nos responsables nationaux qui cèdent à vitesse grand V. Simplification, suppression de mesures et normes environnementales, coupes budgétaires, restriction des libertés associatives : notre capacité d’action collective est démantelée sous nos yeux et aucune alternative n’est proposée en remplacement.
Dernier exemple en date : la proposition de moratoire sur les énergies renouvelables adoptée par l’Assemblée nationale, alors que nous savons que c’est notre principal outil de souveraineté énergétique pour les quinze prochaines années.
Réveillons-nous ! Le soutien de l’opinion aux enjeux démocratiques et environnementaux reste largement majoritaire. Nous sommes nombreux – citoyens, entrepreneurs, travailleurs, fonctionnaires – à avoir intérêt à une transition sociale et écologique réussie.
Les citoyens et citoyennes ne se détournent pas de la lutte contre le changement climatique. Selon Parlons Climat, cela reste l’une des priorités des Français, même si dans un contexte économique difficile d’autres enjeux – pouvoir d’achat, sécurité – occupent une place plus centrale dans les priorités immédiates.
Il s’agit de leur proposer une transition qui améliore les conditions de vie, protège les plus vulnérables et donne aux citoyens et citoyennes le pouvoir d’agir sur leur avenir.
En finir avec des politiques imposées d’en haut
Partout en Europe, les politiques climatiques se heurtent en effet à des fractures économiques profondes. En France, 79 % des citoyens estiment que «ce sont les plus pauvres qui paient la crise climatique et énergétique, alors que les plus riches en sont responsables». Dans la plupart des pays riches, les émissions de la moitié la moins émettrice de la population ont diminué depuis 1990, tandis que celles du décile et du centile les plus émetteurs ont augmenté.
La crise climatique ne frappe pas tout le monde de la même manière. Elle aggrave les inégalités déjà existantes : pour les agriculteurs et agricultrices confrontés à la sécheresse, pour les habitants des quartiers populaires surexposés aux vagues de chaleur, pour les habitants des ruralités qui n’ont pas d’autre choix que de se déplacer en véhicule. C’est une réalité que les partis d’extrême droite préfèrent ignorer – car elle contredit leur prétention à représenter les oubliés, sans jamais proposer de solution crédible.
Oui, il faut en finir avec des politiques imposées d’en haut, déconnectées du quotidien, qui alimentent le ressentiment. C’est ce qui s’est passé avec les zones à faible émission (ZFE) : pourtant conçues pour améliorer la santé et protéger le climat, elles sont devenues le symbole d’une transition injuste, où l’État n’apporte pas suffisamment de soutien pour remplacer le parc automobile et proposer des transports en commun. Ces mesures, mal préparées et mal expliquées, apparaissent rigides, déconnectées, et alimentent la défiance envers l’action climatique.
Il faut d’urgence revoir nos politiques publiques en concertation avec les personnes concernées. Les réussites ne manquent pas : projets d’énergies citoyennes, leasing social pour les véhicules électriques, rénovation des bâtiments qui allège les factures des plus précaires et crée des emplois pour les artisans.