«Comprendre les temps présents, tout en incitant le public à découvrir le monde par lui-même, l’esprit du voyage étant indissociable de l’envie de découvrir, du désir de partager et de la volonté de comprendre…» Depuis 2002, le festival savoyard du Grand Bivouac (dont Libération est partenaire) se tient chaque année à la mi-octobre à Albertville. Pour Guy Chaumereuil, son président fondateur, «ce qui n’a pas changé, c’est notre détermination à inciter un public à mieux comprendre le monde à travers des destins singuliers et collectifs. Il ne s’agit pas forcément de coller à l’actualité mais plutôt de suivre ces personnes qui nous font découvrir l’état de leur monde, via une approche pédagogique et humaniste. Le voyage est un vecteur de compréhension.»
Au départ tourné vers l’aventure et l’exploit sportif, le festival a évolué. «Les films et documentaires de voyage tendaient à se répéter et étaient très autocentrés. On a inversé la proposition en incitant les gens à voyager par eux-mêmes. Le cinéma documentaire et les livres nous permettent d’accéder à cette compréhension du monde dans ses dimensions humanistes et environnementales.» Et d’expliquer la démarcher : «On sélectionne une quarantaine de films parmi quelque 600 documentaires. C’est, au final, une vision impressionniste, explique Guy Chaumereuil. On ne diffuse jamais de films avec des commentaires. On laisse le spectateur découvrir par lui-même. Présenter La Terre est bleue comme une orange filmé par habitants du Donbass, c’est offrir un contact direct avec l’humain ».
« C’est dur, parfois, de faire comprendre que le Grand Bivouac n’est plus un festival du film de voyages, mais le public l’a très bien compris. Nous réalisons entre 32 000 et 35 000 entrées par édition. Un nouveau public est venu par le festival en ligne, les thèmes choisis sont plus géopolitiques. En 2015, “Les beaux matins du monde”, en 2018, “Les chambardements qui agitent la planète”, en 2020 “Prendre le monde à témoin”, et enfin, en 2021, “Notre part d’humanité”. Cette année ce seront “Les identités remarquables”. »
«Mais bon, on ne va pas devenir un séminaire géopolitique ou de réflexion sur soi, poursuit en riant Guy Chaumereuil. Quand on conçoit un thème, la question qu’on se pose est : “Qu’est ce qui, dans six mois, pourrait faire un écho direct aux préoccupations des gens ?” Aujourd’hui, on transfère une partie de nos vies sur le numérique. On signe une pétition et on a l’impression d’avoir agi. Est-ce qu’il reste encore en nous une part d’humanité ? Sommes nous toujours des humains qui peuvent aider l’autre dans la rue ? C’est fondateur d’aller chercher loin, à l’étranger. Il y a une universalité des comportements. Quand porte un regard sur ce qui se passe ailleurs, on se sent proche, on se nourrit d’autres choses. Et les gens repartent avec la pêche ! Ce festival ne cache rien des difficultés du monde. Le public y trouve un sens à sa propre vie !»