Energie, transports, rénovation durable, végétalisation… En 2023, Libé explore la thématique de la transition écologique lors d’une série de rendez-vous inédits. Objectif : témoigner des enjeux et trouver des solutions au plus près des territoires. Quatrième étape à Dunkerque, les 13, 14 et 15 octobre.
Ecrivain et critique littéraire, Samuel Lequette propose régulièrement à Dunkerque des événements sur les arts urbains et l’écologie. Après avoir coordonné un livre (Décamper, La Découverte) sur la question de l’accueil des réfugiés dans le nord de la France, et un autre sur le mouvement #MeToo (Cours petite fille, Edition des Femmes), sur la question des violences faites aux femmes, il vient de sortir Nos absences futures, un album mêlant rêves, dialogues amoureux et voyages imaginaires. Rencontre.
Quels sont les sujets abordés dans vos textes ?
Depuis Hyperrêve [projet poétique et musical servant de pseudonyme à l’artiste, ndlr], j’aborde des sujets assez graves ou sérieux, comme le changement climatique, la question migratoire… Dans ce travail d’écriture, je ne me présente pas comme un chanteur engagé. Je suis compositeur, producteur, interprète. Je ne sers pas une cause, mais j’aborde ces questions dans un dispositif énonciatif particulier. Avec Nos absences futures, (huit chansons mêlant rêves, dialogues amoureux et voyages imaginaires), j’ai voulu faire un album choral, un dialogue avec des écrivains, un duo avec Françoiz Breut, Alain Damasio, Chloé Mons, Barbara Carlotti… L’écologie, la sociologie sont assez présents dans les textes qui ont une dimension littéraire. Ce ne sont pas des chansons de révolutionnaires ou de «sans-culottes». Elles sont assez stylées. Avec Alain Damasio, on a réalisé un «cut-up» (1) du rapport du Giec, une autre chanson sur le cimetière marin aborde la question de l’immigration, une troisième parle de la guerre en Syrie.
La fin d’un monde, la catastrophe, l’environnement humain… Votre univers n’est pas toujours optimiste.
Je pense un peu comme Timothy Morton, un philosophe anglais de la pensée écologique, connu dans univers pop, qui est un ami de la chanteuse Björk. C’est terrifiant, déprimant… La mélancolie est la façon la plus concrète d’y remédier. C’est assez réaliste de ressentir cela. En tant qu’artiste, je ne conçois pas d’évacuer ces questions obsédantes pour moi. Même si j’ai conscience du pouvoir relatif des chansons sur les actions humaines. Je n’ai pas l’impression de pouvoir changer le monde avec mes chansons, même si j’aimerais bien. Je suis assez passionné par le renouvellement des formes de mobilisations. Je regarde de près ce que font des gens comme Camille Etienne et les personnes qui gravitent autour d’elle. Le positionnement de jeunes intellectuels et leur manière d’articuler pensée et action me passionnent.
Vous montez aussi des projets de rencontres pour faire bouger les choses. Quels sont-ils ?
Je fais un travail de commissariat d’événements, j’organise des conversations et des performances, des concerts sur les questions d’écologie contemporaine. J’invite une personnalité, un chercheur qui a à voir avec la question climatique, l’énergie, des gens comme Cyril Dion ou Aurélien Barrau. Ce qui est complexe, c’est bien la multitude de signes contradictoires. Il y a une prise de conscience et les industries convergent en même temps. Mais l’imagination humaine dévoile dans le même temps de nouvelles horreurs. Cela ne m’empêche pas de suivre les actions des jeunes militants et activistes qui parviennent à mobiliser.
(1) Le cut-up est une technique littéraire, inventée par l’auteur et artiste Brion Gysin, et expérimentée par l’écrivain américain William S. Burroughs, où un texte original se trouve découpé en fragments aléatoires puis ceux-ci sont réarrangés pour produire un texte nouveau.