Comment faire rimer éducation et innovation ? A l’occasion des 20 ans du Café pédagogique, Libération organise avec des enseignants et nos invités une journée de débats et d’échanges, le 25 novembre à Paris. En attendant ce forum, rencontres avec quelques professeurs.
«Le principe, c’est d’immerger les élèves dans un univers avec un scénario bien précis, en les mettant en face de problèmes à résoudre, pour lesquels ils doivent utiliser leurs compétences scientifiques.
«Avec le groupe de professeurs qui a travaillé sur le projet, on s’est rencontrés dans un congrès sur la classe inversée. C’est un processus pédagogique qui consiste à inverser les temps d’apprentissage classiques : en temps normal, il y a le cours en classe et ensuite les devoirs. Le principe, c’est d’inverser ça pour acquérir la théorie à la maison, puis en classe des activités sont proposées pour mettre en pratique, consolider et s’adapter aux niveaux de compréhension des élèves.
«On a eu l’idée de créer ce jeu qui se passe sur Mars pour réaliser l’ensemble du programme de SVT de lycée. L’inspiration est venue du film Seul sur Mars. On a constaté que le fait d’essayer de coloniser cette planète faisait intervenir un ensemble de domaines scientifiques et tous les problèmes qu’un astronaute pourrait rencontrer sur place sont des choses qui peuvent nous toucher sur Terre.
«Pour Survive on Mars, on a imaginé plusieurs scénarios que l’on appelle des missions. Dans l’une d’elles, les astronautes dépriment, ils ont besoin de nature. Trois scientifiques incarnés par les élèves – un botaniste, un physicien, un spécialiste du sol – sont chargés de créer un espace dans lequel on pourra trouver des animaux et des végétaux terrestres. Il faut donc arriver à rendre un sol fertile, comprendre les besoins qu’ont les plantes pour grandir et comment réaliser tout ça dans les conditions martiennes. Grâce au plateau de jeu virtuel, les élèves peuvent se déplacer dans la base et questionner les habitants pour connaître leurs souhaits, puis ils élaborent un projet de faisabilité, et enfin ils présentent le projet à la classe pour élire le plus réalisable.
«Travailler de cette façon motive les élèves, ils sont plus engagés et prennent du plaisir en classe. J’avais constaté un manque de curiosité de plus en plus important au fur et à mesure des années. Globalement, je n’étais pas satisfait du niveau d’investissement. Le public change, alors il faut changer de méthode. Il faut toujours être en observation : les jeunes d’aujourd’hui sont très différents d’il y a dix ans. La technologie numérique est un vecteur majeur de changement d’habitude. L’attention est moindre ou détournée, ils sont aussi en hypercommunication, constamment en contact les uns avec les autres. L’idée, c’est de mobiliser leurs compétences pour l’apprentissage et la découverte.
«J’essaye de garder un œil sur les évolutions technologiques. Je ne veux pas innover pour innover mais pour m’adapter au public. En ce moment, on commence à parler de réalité augmentée et virtuelle, de métavers. Pour l’instant, c’est encore à la marge, mais peut être que dans cinq ou dix ans, il y aura de plus en plus de réalité virtuelle dans les classes.»