Alors que la France est l’un des pays de l’OCDE où les déterminismes sociaux pèsent le plus sur la réussite des élèves, les inégalités scolaires continuent de s’aggraver, faisant mentir la promesse républicaine d’une école favorisant l’émancipation et l’égalité des chances. D’après l’OCDE (enquête PISA – 2 018), 62 % des enfants d’ouvriers obtiennent le baccalauréat contre 94 % des enfants de cadres.
Pourtant depuis sept ans les gouvernements successifs refusent de s’attaquer enfin à ce fléau. Au contraire, alors que la situation continue de se dégrader et que le milieu social d’origine des élèves exerce toujours plus d’influence sur leur parcours scolaire, les annonces successives fragilisent l’école et accentuent la ségrégation.
Si la réforme du «choc des savoirs» a fait l’unanimité contre elle, les annonces récemment faites de la suppression à venir de 4 000 postes d’enseignants démontrent bien la déconnexion totale d’un gouvernement à la dérive.
Notre école vaut mieux que ça.
C’est la raison pour laquelle au département de Loire-Atlantique nous luttons contre une école à deux vitesses et pour offrir à tous les collégiens les mêmes conditions d’accueil et d’apprentissage. C’est ce maître mot qui nous a guidés lors de la mise en place de notre projet d’amélioration de la mixité sociale et scolaire dans les collèges publics de Nantes.
Depuis septembre, un nouveau collège a ainsi ouvert ses portes dans le centre-ville de Nantes pour accueillir les élèves de deux collèges très favorisés et d’une partie des élèves d’un collège d’éducation prioritaire. L’autre partie est accueillie dans deux autres collèges favorisés du centre-ville. Au total, près de 2 000 élèves apprennent désormais ensemble dans trois collèges mixtes, mettant fin à l’assignation à résidence et l’entre-soi choisi.
Une action concrète qui prouve qu’il est possible d’œuvrer pour plus de mixité sociale et scolaire dans les collèges. Ce projet ambitieux a été mené en lien avec les services départementaux de l’éducation nationale, la ville de Nantes et de nombreux acteurs institutionnels, associations, syndicats, collectifs, fédérations de parents d’élèves. Il fait l’objet d’un suivi au long cours par des universitaires, afin d’observer les bienfaits de cette mixité sur le bien-être et les résultats scolaires des élèves.
si la Loire-Atlantique s’engage - au même titre que d’autres collectivités en France, et malgré la situation budgétaire inédite et anormale dans laquelle sont plongés les départements - c’est au gouvernement d’agir enfin avec force et détermination. Il doit d’abord le faire en annulant les groupes de niveau rejetés par l’ensemble de la communauté éducative. De même, le nombre d’élèves par classe doit être réduit pour favoriser les apprentissages.
Enfin, parce que les collèges privés accueillent deux fois plus d’élèves socialement très favorisés (41,7 % contre 20,5 %) et deux fois moins d’élèves défavorisés (16 % contre 40 %) que les collèges publics, il est temps que le gouvernement agisse pour que l’enseignement privé joue le jeu de la mixité sociale. Les leviers sont à portée de main, à commencer par la modulation des moyens attribués aux établissements en fonction des caractéristiques sociales des élèves. Cela nécessite du courage et du volontarisme politique, mais c’est l’avenir de nos enfants qui est en jeu !
Les solutions existent !
Face à une véritable «archipélisation» en cours de notre société, notre pays n’a plus le choix s’il veut rester fidèle aux promesses d’égalité qu’il porte en lui. Or la mixité sociale, c’est la défense des communs, c’est le rempart contre la fragmentation de la société et le séparatisme social. L’imposer à l’école, c’est lui permettre de demeurer «l’asile inviolable où les querelles des hommes ne pénètrent pas», comme l’écrivait Jean Zay en 1936, autant que le gage d’une société enfin apaisée.