Comment réconcilier métropoles et campagnes, périphéries et centres-villes, écologie et habitat ? Plongée, en partenariat avec la Plateforme d’observation des projets et stratégies urbaines (Popsu) dans les initiatives qui améliorent les politiques urbaines.
En matière d’habitat, la logique marchande a invisibilisé le potentiel du logement en zone rurale comparé à l’attention portée sur la situation du logement en ville. Symboles de cette parabole : les guides des hebdomadaires avec les classements des villes basés sur les prix de l’immobilier, l’impossibilité pendant des années pour les zones rurales de disposer du prêt à taux zéro ou encore la loi Elan, qui amène à concentrer les efforts des opérateurs sur les «grosses opérations».
Résultat : le potentiel pour loger ou reloger est peu investi et l’attention portée par les opérateurs est moindre, voire absente pour beaucoup de villages. Le changement de regard sur la ruralité doit aussi concerner l’enjeu du logement à l’heure du changement climatique, quand déjà un tiers des habitants du pays réside à la campagne.
De nombreux logements à requalifier
Il n’y a pas que la question de la vacance qui est complexe à gérer pour les élus, tributaires des stratégies familiales, peu outillés pour mener des bras de fer juridique et se réapproprier une partie du parc ou maîtriser le développement de la commune. Le fort potentiel rural est connu des maires, mais pas encore identifié par les opérateurs ni l’Etat qui priorisent l’urbain dans leur stratégie respective.
De nombreux logements sont à requalifier, à rénover, à remplacer, des terrains sont à construire, tout en respectant la sobriété, déjà largement la marque de la gestion foncière rurale. D’où l’urgence d’une politique choc pour révéler les solutions et aider l’écosystème à penser la France en grand, en prenant en compte les défis à relever dans les 88 % du territoire à dominante rurale.
A lire aussi
Comment, dès lors, aider les maires à agir dans un monde du logement obsédé par la concentration des moyens et des investissements en zones denses quand eux, seuls ou ensemble dans les groupements de communes, ont mille projets pour se réapproprier un pouvoir d’agir au bénéfice d’un aménagement équilibré du territoire, entre régions et au sein des zonages de proximité.
Défis de la transition écologique
C’est le sens de la contribution de l’Association des maires ruraux de France, fondée sur une approche en matière d’occupation de l’espace autour de six axes : agir sur le bâti existant, inciter les bailleurs sociaux à porter de petites opérations immobilières dans les territoires ruraux, lutter contre la spéculation foncière, flécher les dispositifs d’aides à l’accession au logement et à l’amélioration de l’habitat en dehors des zones tendues, renforcer la capacité d’agir des maires en confortant l’échelon communal et, enfin, ne pas s’interdire de mener une réflexion globale sur l’exercice d’un droit de propriété en adéquation ; et plus largement, à la manière dont notre pays envisage de revoir sa politique d’aménagement du territoire aujourd’hui, ciblée sur une hiérarchie des accompagnements au profit de la ville.
Il y a pourtant tant à faire, notamment sur la nécessité de revoir le patrimoine rural à l’aune des défis de la transition écologique et le potentiel pour le secteur économique de «refaire le village sur lui-même», de revoir, grâce à la spécificité rurale, l’opportunité d’«habiter autrement», par exemple en densifiant sans dénaturer. Dans un monde rural de plus en plus attractif, comme le montrent les dynamiques démographiques, l’enjeu du foncier accessible est clé pour les aménageurs que sont les maires.
A lire aussi
Il n’est pas le seul, celui financier est l’autre partie de l’iceberg : pas de modèle économique et des coûts souvent plus élevés pour des opérations équivalentes en ville. Là encore, le changement de paradigme aiderait à traiter enfin l’espace rural par des mécanismes de péréquations [qui visent à favoriser l’égalité entre les collectivités territoriales sur le plan des ressources, ndlr], comme ceux existant déjà sur l’électricité ou sur le modèle postal.
N’oublions pas celui du patrimoine, source de revenu pour la commune. Quand l’Etat continue de réduire les mécanismes de dotation, il n’est pas interdit de questionner son patrimoine pour en faire à la fois un outil de l’aménagement de la commune et un levier pour consolider les services publics proposés.