Comment réconcilier métropoles et campagnes, périphéries et centres-villes, écologie et habitat ? Plongée, en partenariat avec la Plateforme d’observation des projets et stratégies urbaines (Popsu) dans les initiatives qui améliorent les politiques urbaines.
Le lotissement est souvent associé à une forme urbaine de mauvaise qualité, consommatrice de foncier et coupable de favoriser le repli sur soi. Ce n’est pourtant qu’une procédure administrative permettant la division d’un terrain en vue de bâtir. Il nous semble qu’elle peut être particulièrement adaptée pour répondre aux objectifs de sobriété foncière tout en proposant une forme de «circuit court» pour la production de logements abordables.
Dans le cadre du lotissement, les particuliers achètent un terrain préalablement divisé et «font construire» : ils sont maîtres d’ouvrage de leurs propres logements. La plupart du temps, ils font appel à des maisons individuelles qui ont pignon sur rue et qui, grâce à son réseau de petits artisans locaux en sous-traitance, garantit un prix et un délai d’achèvement.
Reportage
La souplesse offerte par la dissociation foncier-bâti permet de diminuer fortement le coût final du logement. La construction reste simple et peut s’appuyer sur des solutions industrialisées (murs ossature bois, huisseries, pieuvres électriques, etc.). Les normes de construction sont simplifiées et de nombreux intermédiaires, comme les promoteurs, les commercialisateurs ou une bonne partie de l’ingénierie technique, sont évités. Le risque financier est moindre et il est mieux réparti, générant des frais globalement moins importants.
Véritable projet spatial
La particularité de cette procédure amène cependant de nouveaux enjeux pour la conception urbaine et architecturale. Elle demande d’inventer les manières d’encadrer la qualité de cette «architecture sans architectes», réalisée par une grande diversité de particuliers-maîtres d’ouvrage, tous amateurs en la matière. Cette dimension prend d’autant plus d’importance que les objectifs de sobriété foncière poussent à la réduction des tailles des parcelles (350 m², voire moins aujourd’hui) et, ce faisant, augmentent la présence dans l’espace public des éléments bâtis.
Pour réussir ces logements en «circuit court», le lotissement doit faire l’objet d’un véritable projet spatial et ne peut se limiter à un simple découpage optimisé des terrains. Sa conception doit anticiper, dans la configuration même des parcelles, les possibilités offertes en matière d’organisation intérieure et, in fine, de modes de vie.
Décryptage
Ensuite, le règlement de lotissement est l’outil qui permet de fixer des prescriptions portant sur l’implantation, la volumétrie, les revêtements de façade, les types de percements, etc. Ces règles permettent d’assurer une certaine cohérence de l’ensemble bâti, mais également de travailler l’intimité acoustique et visuelle entre les maisons. Alors qu’habiter à la campagne est pour beaucoup synonyme d’un certain éloignement vis-à-vis de ses voisins, l’enjeu est de construire les conditions d’une proximité harmonieuse, dans un espace contraint.
Construction d’un sentiment collectif
A l’échelle du quartier, les aménagements font la part belle au végétal comme à l’infiltration des eaux pluviales. En ne limitant pas l’espace public à sa fonction circulatoire, en s’appuyant sur les parcours du quotidien et dans l’esprit de la polyvalence, on peut proposer des espaces d’interactions sociales : l’effet d’une cour commune qui sert de parking comme d’espace de jeu, un lieu pratique et aménagé pour le tri collectif, accroché aux chemins les plus empruntés, etc. C’est l’espace du «salut, ça va ?» de l’expression de liens faibles, mais essentiels à la constitution d’un sentiment collectif.
Parce que les formes architecturales sont un peu plus élaborées, la rédaction du règlement demande des échanges techniques en amont avec les constructeurs de maisons individuelles, afin de rester économiquement performant.
Le lotissement ainsi constitué présente un visage harmonisé, mais permet aussi des ajustements et des personnalisations encadrées. Dans l’esprit du «circuit court», les particuliers restent les maîtres d’ouvrage de leurs propres maisons et peuvent les concevoir «sur mesure», au plus près de leurs besoins comme de leurs moyens.