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Climat Libé Tour Bordeaux

«Le patriarcat exploite la terre mais aussi les femmes»

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L’écologie et le féminisme sont-ils liés ? Ils devraient l’être pour les penseuses et les penseurs de l’écoféminisme. Fresque et conférence sur le sujet étaient à l’honneur pour en parler ce week-end.
La fresque écoféministe installée au Campus Victoire à Bordeaux le 10 février 2024. Crédit: Patti Delaspre / Ijba
par Orianne Gendreau et Linda Rousso
publié le 11 février 2024 à 10h52

Depuis ses débuts, le Climat Libé Tour, événement tourné vers la jeunesse, associe à chacune de ses étapes une école de journalistes locale (CFJ à Paris, ESJ à Lille ou Dunkerque, Ejcam à Marseille, Ijba à Bordeaux) afin que les étudiants couvrent, avec leurs regards, l’actualité des forums. Reportages, comptes rendus, portraits, photos, interviews… Ces articles sont issus de leur travail.

À peine entrés dans l’atrium du campus Victoire, ce vendredi 10 février, les visiteurs sont alpagués par un homme souriant et loquace. Paul Peinture est artiste peintre. Il travaille en collaboration avec l’association M.E.U.F (Mouvement étudiant universitaire féministe). À droite du hall, entre deux colonnes trône leur œuvre : une fresque participative écoféministe.

«Il y a des préjugés sur la pensée écoféministe car on pense directement à l’essentialisation du corps de la femme. Quand on réfléchit, le patriarcat exploite la terre mais aussi les femmes», soutient Éléa, coprésidente de M.E.U.F. Ce courant est né dans les années 1970 avec l’écrivaine Françoise Eaubonne. Dans son ouvrage, Le féminisme et la mort, elle énonce pour la première fois la logique de domination commune que l’homme entreprend sur la nature et sur la femme.

Une fresque participative pour saisir les enjeux

«Liberté amère, nature en colère, droits pour notre Terre». Ce haïku est l’un des nombreux poèmes que l’on peut retrouver sur l’immense feuille blanche de la fresque écoféministe. Des chutes de tissus et des extraits de journaux embellissent les fines écritures des participants. Les tons violets, verts et orange de l’œuvre renvoient aux couleurs du féminisme, de la nature et de l’association. «La fresque s’est construite autour de l’idée que l’association poserait le décor et qu’après on laisserait libre cours aux gens», explique Marie Busse, coprésidente de M.E.U.F. «Nous voulons qu’ils se questionnent sur eux-mêmes, sur leur place dans la société», complète Paul Peinture.

En seulement quatre heures, le papier est presque complètement recouvert. Eysel et Melina, étudiante en science politique y voient une «manière ludique d’allier deux causes que l’on pense habituellement séparément». Pour Lionel Larré, président de l’Université Bordeaux Montaigne, cette fresque est une porte d’entrée pour repenser l’écologie.

L’amphithéâtre Gintrac est plein. Cette fin d’après-midi se clôt avec une table ronde sur l’écoféminisme. Le changement climatique touche les personnes les plus vulnérables « il pourrait faire basculer jusqu’à 158,3 millions de femmes et de filles supplémentaires dans la pauvreté », déclare Carlotta Gradin, vice-présidente plaidoyer d’ONU Femme France. Le débat se poursuit autour des actions concrètes : Comment concilier écologie et féminisme ?

Pascale d’Erm, journaliste et réalisatrice, a rencontré des Kényanes et des Indiennes qui subissent de plein fouet les effets du dérèglement climatique. «En Inde, ils considèrent que l’eau est un problème de femme». Certaines d’entre elles se réunissent pour construire des bassins de rétention d’eau. C’est cette sororité écologique qui inspire les actrices de cette après-midi de sensibilisation.