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Libération
Climat Libé Tour: tribune

«L’écologie populaire, c’est celle du quotidien»

Aïcha Hattab a lancé une association pour réunir les habitants de son quartier et faciliter des actions pour rendre la vie plus facile et saine. Une façon de refuser que l’écologie soit l’apanage des plus aisés.
La cité des Néréïdes en 2016. (Photo Habitat13)
par Aïcha Hattab, habitante du Bosquet-Néréides, présidente de l’Association culturelle solidaire espoir pour tous (Acsept)
publié le 18 octobre 2024 à 11h52

Jeunesse, biodiversité, justice, décolonialisme… Toute l’année, Libé informe sur les enjeux de l’urgence écologique à travers une série d’événements gratuits et grand public. L’objectif : trouver des solutions concrètes au plus proche des territoires. Cinquième étape du Tour 2024 : Marseille, le samedi 19 octobre (entrée libre sur inscription). Un rendez-vous réalisé avec le soutien de la ville de Marseille, le Mucem et la Citadelle de Marseille, et en partenariat avec le Crédit Coopératif, l’Ademe, le groupe VYV, le groupe SOS, Asics, la Fondation Jean-Jaurès, Greenpeace, Oxfam, la Forêt des Possibles, le Lierre, Médiatransports, Pioche ! Magazine, Vert, le média et BFM Marseille. Entrée gratuite sur inscription.

Je suis une femme engagée dans les combats du quotidien, habitante d’un quartier prioritaire de la ville, présidente d’association sur l’éducation et les dynamiques intergénérationnelle. L’écologie populaire pour moi c’est l’écologie du quotidien. C’est à ce titre que j’ai décidé de créer mon association pour améliorer les difficultés scolaires des enfants, les émanciper intellectuellement, éveiller leur esprit critique et soulager les parents.

L’écologie est culturelle par la force des choses, de génération en génération. Elle se niche dans la distribution des vêtements dans la fratrie, par exemple, mais aussi dans la recette d’un plat revisité (comme le pain perdu), le troc de meubles d’occasion…

Je ne veux pas attendre que l’écologie vienne des quartiers chics. Il est plus simple d’être écolo ou de se dire attentif à la planète quand on peut manger bio, trier nos déchets ou rouler en SUV électrique !

L’écologie, c’est aussi la vivre dans l’éducation qui nous permet de partager les savoirs à moindre coût, de pouvoir être en pleine transition, de s’économiser pour créer des dynamiques collectives autour de l’apprentissage, de partager à un tarif à moindre coût.

Dans cette cité est née une «table de quartier» où les habitants ont créé un lieu de débat et d’action, dont l’objectif est l’amélioration des conditions de vie dans le quartier, notamment des plus fragiles, mais pas que. Car le mal logement nous unit toutes et tous : nous avons mené des actions qui nous ont permis plusieurs expulsions des logements insalubres des cités du Bosquet et des Néréides, et la rédaction d’un livret du locataire grâce au soutien de la fondation Abbé-Pierre.

Avec une finalité : que notre dossier soit reconnu par la justice. Cela a permis d’éveiller les consciences pour dénoncer les problèmes du bâti et les passoires thermiques. Au bailleur, nous tendons la main car il est difficile culturellement de faire condamner celui qui nous donne le toit. Nous avons besoin de lui pour participer à la loi climat et résilience.

Le bailleur doit être intègre face aux lois. Nous vivons une double peine : d’un côté l’augmentation des prix de l’énergie, qui fait que notre loyer modeste augmente avec le coût de la vie sans compensation sociale, et de l’autre la culpabilité de ne pouvoir lutter contre le réchauffement climatique, car nous sommes obligés d’utiliser des chauffages électriques dans nos passoires thermiques.

Il y a deux semaines, nous avons contribué avec des collègues d’Aix-en-Provence et de Marseille à animer un théâtre forum sur l’écologie populaire. Sur la Canebière, nous avons entendu beaucoup de témoignages et d’interventions de gens sur leur santé et leurs maladies chroniques, beaucoup plus que sur les fins de mois difficiles.

Et si l’écologie populaire était d’abord une question de santé ! Notre santé, celle de nos enfants aujourd’hui pour demain. La santé de notre communauté, la santé de notre démocratie et bien sûr la santé de notre planète.

On parle de plus en plus de santé commune, ce serait le moyen de faire de l’écologie un enjeu populaire. Un enjeu vital.