Comment faire rimer éducation et innovation ? A l’occasion des 20 ans du Café pédagogique, Libération organise avec des enseignants et nos invités une journée de débats et d’échanges, le 25 novembre à Paris. En attendant ce forum, rencontres avec quelques professeurs.
«Je considère que les enfants à l’école sont des enfants avant tout et ne sont pas obligatoirement des élèves. Parfois, ils ne savent même pas pourquoi ils viennent à l’école, parfois ils ont ce que j’appelle des empêchements : ils se sentent nuls, ils ont des questionnements sur leur vie, sur les émotions, sur leurs rapports aux autres. Malheureusement ce n’est pas ou très peu pris en compte dans l’enseignement. On voudrait qu’ils soient des élèves par un coup de baguette magique et c’est une aberration totale. Certains le sont mais beaucoup ne le sont pas. Même lorsqu’ils font ce qu’on leur dit de faire, ils ne savent pas forcément pourquoi et puis il y a ceux qui se révoltent ou se replient sur eux. Moi, j’étais bon élève mais ai-je vraiment appris, retenu, donné du sens ? Je ne sais pas.
«L’enfant peut être auteur»
«Ce qui est certain, c’est que les enfants sont des personnes porteuses de plein de choses et je mets en place des actions pour leur donner une vraie place. Depuis que je suis enseignant, j’essaie de mettre en place une autre façon de voir l’école. Je défends une idée, j’ai beaucoup milité pour la pédagogie Freinet. Elle consiste à considérer que l’enfant peut être auteur de ses apprentissages et pas seulement acteur. Le but étant qu’ils décident eux-mêmes, le plus possible, de comment ils vont avancer. Il y a un programme bien sûr, mais ce qui est mis en avant c’est l’autonomie et le travail en coopération. Ils vont chercher, tâtonner, s’exprimer, c’est essentiel.
«Résoudre le problème»
«En plus de ma casquette d’enseignant, j’ai une compagnie de clowns qui s’appelle Tape l’incruste ! Une année, j’ai proposé un dispositif : les empêchements à apprendre vus par des clowns. C’est ce qui m’a valu de gagner un prix de l’innovation pédagogique. Avec des partenaires, nous l’avons mis en place pour permettre aux enfants de penser leurs apprentissages et leurs difficultés à travers des vidéos de clowns. Il ne s’agit pas de clowns de cirque, mais de théâtre, ce sont des personnages. C’est utile parce que ça parle aux enfants. Par exemple, trois clowns sont à la pêche, un des trois n’arrive pas à rester en place et ça pose problème dans le groupe. La scène dure entre quatre et cinq minutes, ensuite il y a une vidéo sur leurs ressentis et enfin une sur les solutions. Elles sont visionnées en classe pour les aider à réfléchir sur leurs propres empêchements. L’exercice permet de poser la question : est-ce que parfois vous aussi vous avez besoin de bouger ? Et on cherche ensemble des moyens de résoudre le problème.
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«Penser l’école et la transmission du savoir avec les enfants est essentiel. J’aimerais que tous les enseignants puissent le faire régulièrement dans chaque classe. C’est pour cette raison que je suis heureux d’intervenir, pour partager mes outils avec mes collègues.»
Daniel Gostain est le créateur du site Penser l’école.