Cet article est publié dans le cadre du Climat Libé Tour. Les 24 et 25 septembre, Libération vous invite à Grenoble sur le thème de «la science qui résiste» pour deux journées de débats, échanges, projections et ateliers à la rencontre de ceux qui se mobilisent.
Chaque été plus chaud que le précédent rappelle l’urgence climatique. Pourtant, la parole scientifique, complexe et évolutive, peine à se faire entendre face aux discours climatodénialistes simplistes et immobilistes. Ce décalage n’annonce pas forcément un divorce définitif entre science et société. Un lien de confiance peut renaître à condition d’impliquer les citoyens dans la diffusion des connaissances et la construction de l’expertise sur les enjeux de transition écologique.
L’association The Shifters illustre bien cette démarche. Les membres, tous bénévoles, animent régulièrement avec professionnalisme et exigence scientifique des conférences ou des ateliers collaboratifs, telle que la «fresque du climat», organisent des rencontres dans une ambiance conviviale avec les citoyens ou des débats grâce à sa soixantaine de groupes locaux. Certains apportent régulièrement leur expertise au think tank The Shift Project sur des sujets aussi variés que l’agriculture, la santé ou l’intelligence artificielle.
La transparence renforce la confiance
Le site «Comprendre 2050», lancé par The Shift Project, l’Ademe et négaWatt en association avec les Shifters, est un exemple d’implication citoyenne. Conçu en prenant en compte les remarques de nombreux journalistes, ce site vulgarise les scénarios permettant à la France d’atteindre la neutralité carbone en 2050. Des Shifters sont intervenus directement dans son élaboration, soit en tant qu’experts pour rédiger certaines pages, soit en tant que non-experts pour vulgariser le propos et le rendre ainsi accessible au plus grand nombre.
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En explicitant clairement et de manière impartiale les points de consensus (comme l’électrification des usages ou le déclin des combustibles fossiles) et les désaccords entre les scénarios (sur la part du nucléaire et des énergies renouvelables dans le mix électrique ou le recours à certaines technologies, par exemple), et donc la diversité des points de vue, «Comprendre 2050» mise sur l’idée que la transparence renforce la confiance dans la science plutôt que de l’éroder. Au-delà des journalistes, ce site est susceptible d’intéresser les décideurs, les enseignants ou tout citoyen désireux de s’informer sur la transition écologique et, pourquoi pas, de s’engager à son tour dans le partage horizontal de connaissances.
Combattre le sentiment d’impuissance
De nombreuses autres associations comme Avenir climatique ou celles porteuses d’ateliers collectifs (2tonnes, Fresque de la biodiversité, 1er degré…) offrent également une alternative à la transmission uniquement descendante par des experts. L’engagement dans ces associations ne doit pas se limiter à certains milieux sociaux ou métiers comme c’est malheureusement encore trop souvent le cas. Ouvriers, agriculteurs, employés de service, cadres… chacun peut contribuer par son vécu à la construction de la société de demain, comme l’a montré la Convention citoyenne pour le climat. S’impliquer et transmettre permet également de combattre le sentiment d’impuissance que certains ressentent face au changement climatique.
Empathie et ouverture d’esprit, parfois absentes dans le militantisme et sur les réseaux sociaux, sont des conditions indispensables pour que cela fonctionne : mépriser une partie de la population, souvent déboussolée face à un monde en mutation, ne fait qu’aggraver la polarisation de la société. Bien sûr, tout le monde ne suivra pas, mais plutôt que de s’épuiser, il est plus efficace d’avancer avec ceux qui veulent agir : par mimétisme, la plupart finiront par suivre.