Menu
Libération
Solutions solidaires: initiative

Mixité scolaire : «Les meilleurs tirent les moins doués vers le haut. Et pas l’inverse !»

Le département de Haute-Garonne a mis en place une politique de mixité sociale que détaille son président Sébastien Vincini.
En Haute-Garonne, le recteur a mis en place un observatoire de la mixité et un parcours d’orientation. Ici, à Toulouse, le 4 septembre 2023. (Adrien Nowak/Hans Lucas via AFP)
publié le 18 novembre 2024 à 10h40

«La mixité sociale dans les collèges apporte de la réussite scolaire : voilà l’objectif !» explique d’emblée Sébastien Vincini, président du conseil départemental de Haute-Garonne et membre de la direction nationale du Parti socialiste. Le projet a été lancé en 2017 suivant la directive de Najat Vallaud-Belkacem en 2016 (quand elle était ministre de l’Education nationale). L’idée était de permettre la réussite scolaire des enfants issus de foyers modestes et des quartiers populaires des grandes villes ou grandes cités.

A Toulouse, il s’agissait des établissements scolaires du Grand Mirail, de Badiou et Bellefontaine, qui avaient les plus mauvais résultats de l’académie. Des collèges REP + (Réseau d’éducation prioritaire), très défavorisés, véritables ghettos, avec des difficultés sociales et scolaires. 85 % de familles défavorisées les fréquentaient, «une catastrophe» du point de vue de la ségrégation, sociale et urbaine.

«Le département n’a aucune compétence en matière pédagogique, mais s’occupe de l’affectation des enfants dans les établissements ; donc de la fermeture de Badiou et Bellefontaine était de notre ressort», insiste le président du département. Les nouveaux élèves de sixième ont donc été envoyés dans de nouveaux collèges comme Fermat ou Michelet, mieux côtés. «On a mis ce projet en œuvre, après près de 160 réunions de concertation. Neuf mois très longs, car on s’est heurté à tous les fronts, des parents et des adultes… A tous les conservatismes, de gauche comme de droite. Après sept ans, on sait qu’on est dans le vrai. Et on a reconstruit deux autres collèges», se félicite Sébastien Vincini.

Premier écueil : l’éloignement. Il a fallu transporter les enfants, via un système de bus. «On a créé une cellule qui suit chaque année la sectorisation de chaque collège, adapté les affectations, et veillé à ce que la mixité sociale soit suivie pour que la situation ne se dégrade pas». Pari réussi : «Plus de réussite scolaire. L’absentéisme et le décrochage sont désormais dans la moyenne nationale. Quant au brevet des collèges, la moitié ne l’avait pas…» L’élu parle désormais d’un «dispositif innovant exemplaire». Et de citer cette anecdote : «Au début, dans les transports en commun, ils disaient qu’ils étaient de tel ou tel quartier, à la fin ils se disent de Toulouse : la mobilité spatiale s’organise.»

«La rencontre avec l’autre ne se décrète pas, elle se fait. Là, on provoque la rencontre et la mixité, c’est une condition de la réussite. On n’assiste pas à l’effondrement des établissements d’accueil. Les classes qui accueillent des élèves de sixième ne dépassent pas 25 élèves. Des professeurs ont réappris leur métier, cela fonctionne. On a mis en place des professeurs mixité, six enseignants qui font les six derniers mois de CM2 et les six premiers mois d’accueil au collège. On a renforcé l’accompagnement humain, en mettant des éducateurs en plus pour éviter les phénomènes de bandes, pour les pauses et les temps de récréation. Au début on recevait des courriers qui mettaient en avant inquiétudes et préjugés. Aujourd’hui, on n’est plus du tout interpellés…»

Le recteur a mis en place un observatoire de la mixité et un parcours d’orientation. Il a fallu 54 millions euros au démarrage de ce projet, des moyens humains, du volontarisme. «Il fallait démontrer que cela fonctionnerait. Je pense que c’est une vraie alternative au système REP plus. 1 700 élèves sont concernés depuis le début du dispositif. Les meilleurs tirent les moins doués vers le haut. Et pas l’inverse !»