Mongolie, la vallée des ours est un documentaire de Hamid Sardar dont le véritable héros est, contrairement à ce qu’on pourrait croire, non pas un ours, mais Tumursukh, le garde forestier. L’ours, on le voit d’abord grâce à ses traces. Il est passé par ici, suivi par un loup, puis un lynx. Les chasseurs s’en sont donné à cœur joie durant des décennies. Il y a dix ans, il n’y avait presque plus d’animaux à tuer… En 2014, le gouvernement a décidé que l’endroit deviendrait une zone protégée, il a fallu trois ans pour que les oiseaux reviennent.
«Pour attraper un chasseur, il faut un autre chasseur. Seul un chasseur peut prédire ce qu’un autre chasseur va faire», explique Tumursukh. L’endroit est sauvage. Dans certains coins, il n’existait pas de sentiers, même les chevaux ne pouvaient passer… Aujourd’hui, certains animaux n’ont jamais entendu de coups de feu, n’ont jamais vu d’humains. On voit passer des oies sauvages, majestueuses dans le ciel.
Arrivée des chercheurs d’or
Les paysages sont grandioses. La Mongolie attire désormais les touristes. 20% du territoire est en zone protégée. D’ici à 2030, le chiffre passera à 30%. «La communauté locale doit faire partie de la solution», explique le garde forestier.
Dans ce film, il y a aussi bien des raisons d’espérer. Des animaux avaient disparu pendant cinquante ans, comme la panthère des neiges. Ce grand prédateur est revenu aujourd’hui, et ne peut s’intégrer que dans un «système écologiquement sain».
En revanche, l’arrivée des chercheurs d’or a été une catastrophe pour cet environnement. «J’ai réussi à transformer douze braconniers en gardes forestiers – une jolie reconversion – et maintenant ce sont mes meilleurs rangers, dit encore le gare forestier. Certains étaient pourtant des voyous, des criminels.»
Véritable scène de chasse
«Que faisons-nous si un ours nous attaque ?» demande un nomade. Car les animaux s’en prennent aux troupeaux et parfois aux hommes. Le garde explique que ce ne sont pas des ours locaux mais des animaux venus du nord, car les humains ont empiété sur leur territoire. Les plantigrades sibériens migrent depuis la Russie où ils ne trouvent pas de quoi se nourrir et arrivent en Mongolie. Les gardes leur ont donné des surnoms. Il y a «Fierceblack» ou «Gentle Brown». Le changement climatique n’y est pas pour rien, il a aggravé les choses, le temps devient plus sec, il y a aussi des feux de forêt. Le monde brûle. Quand il faut intervenir pour éloigner un animal trop agressif, les gardes du parc n’ont pas de pistolet hypodermique pour endormir l’ours, alors ils le font à l’ancienne, une corde au bout d’un bâton leur permet de faire entrer la bête dans la cage.
Plus loin, on assiste à une véritable scène de chasse avec des hommes montés sur des chevaux qui courent derrière l’ours, comme des cow-boys après un taureau. Et à la fin, il termine dans la cage. On les voit, plus loin, le relâcher après l’avoir transporté en hélicoptère dans une vallée plus sauvage où il risquera moins d’attaquer les populations nomades.
«Ce devrait être une montagne paisible et abondante, un paradis pour les animaux sauvages», commente le garde forestier. Et il conclut, les larmes aux yeux : «La vie sauvage partout. Les animaux. Et pas de chasseurs, c’est ma vision.»