Informer, débattre et envisager des solutions au plus près des réalités et des enjeux. Rendez-vous le samedi 16 décembre à la Friche la Belle de Mai, à Marseille (Entrée libre sur inscription dans la limite des places disponibles), pour la sixième et dernière étape de l’année 2023 du «Climat Libé Tour».
La planète n’absorbera pas une quantité illimitée de pollution et l’homme non plus. Cinquante ans après le rapport Meadows qui alerte sur les limites de la croissance, celui du Giec 2022 donne trois ans au monde pour plafonner ses émissions de gaz à effet de serre.
Les chiffres accablent l’industrie du vêtement qui empoisonne la terre, l’air et l’eau. Pourtant, rien ne freine la mégamachine des apparences où l’accumulation des objets, rapidement achetés et aussi vite jetés, a dévoyé le plaisir. La production mondiale de textile a doublé entre 2000 et 2015, et elle devrait encore plus que doubler d’ici à 2030. En 2022, l’UE a importé par avion 387 009 tonnes de vêtements, textiles et chaussures, et en a exporté 346 778 tonnes. Les pays du Sud sont devenus les poubelles de notre surconsommation jusqu’à envahir le désert d’Atacama au Chili. En Chine, les odeurs et la pollution des villes de Xintang et Gurao rappellent les descriptions apocalyptiques de Manchester au XIXe siècle. Pour desservir ses 5 815 magasins, Zara centralise ses articles textiles à l’aéroport de fret de Saragosse et quinze avions-cargos affrétés chaque semaine les dispatchent dans le monde. Crise climatique ou pas, l’industrie de la mode empoisonne en continu la planète et le corps humain.
Nous n’ingérons pas nos chaussettes mais la peau respire et absorbe par les pores toutes sortes de substances toxiques, cancérigènes, cancérogènes et mutagènes. L’analyse du lait maternel de 34 mères par l’université polytechnique des Marches à Ancône (Italie) a indiqué que les trois quarts des échantillons contenaient des microplastiques. Rouges, oranges, roses et bleus : ce sont les couleurs des douze microplastiques également retrouvés dans quatre placentas sur six par l’hôpital Fatebenefratelli de Rome.
Pour comprendre l’ampleur de la mégamachine, il suffit de se rendre à Aubervilliers et à Marseille, où les communautés chinoises Wenzhou tiennent des centres de gros textiles. Ces zones sont symptomatiques d’une civilisation matérielle où le respect de l’environnement et l’harmonie sociale ont été supplantés par des tonnes de vêtements et d’accessoires réalisés dans des ateliers clandestins liés à différentes mafias.
Les sols, les rivières, l’air et les corps humains sont devenus les royaumes du plastique gangrenés par un système productif basé sur la destruction de la planète et de la dignité humaine. Antonio Ragusa, directeur de l’étude sur les placentas colorés, alerte : «C’est comme avoir des bébés cyborg.» Lorsque le plaisir est devenu un poison, une question se pose : dans quel monde voulons-nous vivre ?