Fin décembre, les 500 000 habitants de la métropole de Montpellier bénéficieront de la gratuité des transports dans les bus et les trams. Une mesure à imiter dans toutes les villes de France ? Rendez-vous le 21 décembre, à l’Opéra Comédie pour un débat sur les enjeux de la mobilité.
Rencontre réalisée mi octobre à Dunkerque lors de la cinquième étape du Climat Libé Tour.
«On est attaché à la bagnole, on aime la bagnole. Et moi je l’adore.» Ces mots, lâchés par le président de la République dans une interview télévisée en septembre dernier sonnent faux, à une époque où la sobriété et l’électrification sont prônées. Samedi 14 octobre, à Dunkerque, la «bagnole» a été au cœur du dernier débat du Climat Libé Tour auquel participait Patrice Vergriete, ministre délégué chargé du Logement, ancien maire et actuel président de la communauté urbaine de Dunkerque.
Sous votre mandat, Dunkerque est devenue la première agglomération française à rendre les transports publics gratuits. Une manière, selon vous, de remplacer la «bagnole» ?
Une manière de changer de paradigme. Les habitants de Dunkerque ne calculaient pas le bus. En tant que citoyen dunkerquois avec une voiture, on ne réfléchissait pas. Le bus n’était pas une option. On se demandait : «Où est-ce que je vais me garer ?» et non «Est-ce qu’il vaut mieux que je prenne le bus ?» Le transport public n’entrait pas en compte au moment de l’arbitrage. Et donc, par habitude, tout le monde prenait la voiture. Avec la gratuité, le bus devient une option. Vous n’avez pas besoin d’acheter une carte ou un ticket en amont du déplacement. Même si vous avez une voiture, vous vous dites : «Tiens, aujourd’hui je vais prendre le bus, il y a une manifestation en centre-ville, je ne vais pas savoir me garer.» Le transport public entre dans la culture collective, même sur des territoires où l’on circule en voiture. Cette semaine, on a encore battu le record de fréquentation du transport public à Dunkerque.
Conseilleriez-vous aux autres agglomérations françaises de franchir le pas ?
La gratuité du transport public est outil extraordinaire, mais qui ne fonctionnera pas partout. Si la voiture est privilégiée, c’est souvent parce qu’il y a un problème d’offre. En banlieue parisienne, si on regarde l’offre, ce n’est quand même pas terrible. Ces citoyens auraient envie de prendre les transports collectifs, parce que la voiture, c’est chiant, mais l’offre n’est pas à la hauteur. Dans ce contexte, la gratuité est plutôt mauvaise. Cela va augmenter la demande, et quelque part, contraindre encore plus l’offre. Sur ces territoires, la priorité est de développer l’offre de transport. En revanche, dans des agglomérations moyennes, comme Dunkerque, où il est facile de se déplacer en voiture, les gens ne pensent pas à prendre les transports publics. Ces villes ont le bon profil pour mettre en place cet outil. La gratuité des transports publics en moyenne agglomération, ça marche.
Comment expliquez-vous les réticences de certains maires ?
On serait tenté de croire que ce qui est gratuit n’a pas de valeur, ou que la gratuité des transports publics coûte cher à l’agglomération. Mais ce n’est pas quelque chose qui coûte si cher que ça ! A Dunkerque, le manque à gagner a été de 4 millions et demi d’euros quand on a supprimé les billets, sur un budget total de la collectivité urbaine de 500 millions d’euros. Donc c’est accessible. Ce qui coûte cher, c’est le développement des transports : puisqu’on a doublé la demande, il faut doubler l’offre. Ce que je prône, c’est qu’il ne faut pas écarter cet outil a priori et par principe.
Le transport public, c’est très pragmatique, pourquoi les gens ne prennent pas le transport public ? Comment substituer la voiture ? Ce que je veux dire aux maires c’est : n’écartez pas la gratuité par principe, c’est un outil de politique publique qui produit beaucoup de bonnes choses.