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Libération
Table ronde

Réconcilier : L’interdépendance «comme une évidence»

Transition écologique : le temps des villes et des territoiresdossier
Le débat «L’équité territoriale, accélérateur de transition écologique», était au cœur des discussions d’une des tables rondes du colloque de l’assemblée nationale, le 23 mai.
La digue sur la mer des Saintes-Marie-de-la-Mer (Bouches-du-Rhône). (Manuel Cohen/AFP)
par Valérie Sarre
publié le 10 juin 2024 à 23h26

A l’heure de la transition écologique, en partenariat avec la Plateforme d’observation des projets et stratégies urbaines (Popsu), plongée dans les projets et initiatives qui font bouger les politiques urbaines.

«Le discours sur la relation entre les métropoles et le monde rural a clairement changé, reconnaît Eric Charmes, géographe à l’ENTPE. Depuis 2014, puis la crise des gilets jaunes, on observe une prise de conscience d’être allé trop loin dans des politiques favorables aux métropoles. Tout l’enjeu aujourd’hui est de rééquilibrer ces relations entre les territoires», souligne-t-il. Car c’est bien là, la difficulté.

On préfère parler aujourd’hui «d’interdépendance» des territoires. Et les grandes métropoles semblent en effet avoir compris qu’elles ont bien besoin du monde rural. Comme en témoigne Mathieu Klein, président de Nancy Métropole, autre invité du colloque sur la transition à l’Assemblée nationale le 23 mai : «Nancy coopère avec ses voisins via des contrats de réciprocité, par exemple. Moins de 1 % de ce qu’il y a dans nos assiettes provient de l’agriculture locale!», souligne-t-il. Cet intérêt accru des métropoles se fait d’ailleurs parfois sentir très fortement. «Nous sommes un territoire de forêt, d’eau et de montagnes, une terre vivrière dont les métropoles d’Aix et Marseille attendent beaucoup», témoigne Sandrine Cosserat, maire de Volonne, dans les Alpes-de-Haute-Provence. «Les territoires ruraux sont encore perçus comme des ressources nécessaires pour les métropoles», souligne la géographe Monique Poulot, qui pointe l’importance de ce vocabulaire pour comprendre la complexité de leurs relations.

Certaines comme l’Eurométropole de Strasbourg offre des exemples assez novateurs. «Nous avons signé des contrats de réciprocité avec les Vosges du Nord», explique sa présidente Pia Imbs – maire de Holtzheim (4 000 habitants) et vice-présidente à l’équité territoriale au sein de la métropole. «Cela exprime un vrai engagement de la métropole auprès de ses 33 communes et même au-delà.» Car, comme le rappelle Cécile Duflot, directrice d’Oxfam France, «la question des inégalités territoriales est aussi celle des inégalités sociales. D’autant que celles-ci sont renforcées par l’aggravation du changement climatique».

Dans ce contexte de dérèglement climatique et la mise en place du Plan national d’adaptation au changement climatique (Pnacc), les territoires ruraux se retrouvent souvent en première ligne. «Pour créer des kilomètres de digues afin de prévenir les risques d’inondation, les communes comme la nôtre bénéficient de moyens beaucoup plus faibles que ceux des métropoles, analyse Sandrine Cosserat. On n’a pas encore assez pris la mesure des charges qui pèsent sur les communes rurales.» En plus des besoins financiers, celles-ci expriment aussi un besoin accru «d’ingénierie» pour concevoir et réaliser ces projets. Autant d’outils qui leur font encore défaut.

Le constat qui se dégage est donc on ne peut plus clair : «La solidarité entre les territoires est une évidence, résume Jean-Claude Raux, député de Loire-Atlantique. Pour se nourrir, pour l’eau, pour l’air que nous respirons. Nous n’avons pas d’autres choix que de réconcilier villes et campagnes pour relever ensemble les défis qui nous attendent.» Il ne reste plus qu’à mettre en action cette évidence…