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Gratuité des transports : initiative

Transports : dans les zones rurales, réservez, c’est (presque) gratuit !

Gratuité des transports : un ticket pour la ville ? dossier
Ni bus, ni taxi, le transport à la demande se développe dans les zones rurales et périurbaines peu denses. Un service public de mobilité à petit prix.
Arrêt «Rubis'Plus», le service de transport à la demande de la région de Bourg-en-Bresse (Ain). (Grand Bourg Agglomération)
publié le 18 décembre 2023 à 16h27
Fin décembre, les 500 000 habitants de la métropole de Montpellier bénéficieront de la gratuité des transports dans les bus et les trams. Une mesure à imiter dans toutes les villes de France ? Rendez-vous le 21 décembre, à l’Opéra Comédie pour un débat sur les enjeux de la mobilité.

On l’appelle «T’Lib» dans l’Allier, «Rubis’Plus» du côté de Bourg-en-Bresse ou «En Aban» en Béarn. Encouragé par la dernière loi mobilité (2019) entre autres alternatives à la voiture individuelle, le transport à la demande (TAD), à mi-chemin entre la ligne de bus régulière et le service de taxis, essaime partout en France. De quoi résoudre la délicate équation de transports en commun dans les territoires peu denses ?

«Je crois à la multitude des outils : le transport à la demande, oui, mais au côté d’incitations au covoiturage ou à l’autopartage, de l’encouragement des mobilités douces…» nuance Raphaël Norblin, conseiller communautaire de l’agglomération Evreux Portes de Normandie. Sur cette collectivité à 80 % rurale, un «taxi-bus» a été expérimenté dès 2013, et devrait être étendu dès mars à toutes les communes (hors les zones urbaines densifiées d’Evreux et de Gravigny), pour toucher jusqu’à 60 000 habitants. Comme tout TAD, ce taxi-bus est collectif (au moins 4 places), et doit être réservé par les usagers, dont il s’adapte en partie à l’itinéraire. S’il n’est pas gratuit, le tarif est bien en deçà de son coût réel pour les finances publiques. Pour l’élu, le dispositif n’a pas vocation à se substituer aux déplacements automobiles quotidiens, mais «seulement» à répondre aux besoins ponctuels d’habitants non véhiculés (jeunes, seniors, personnes à mobilité réduite…) : un rendez-vous chez le médecin, un plein de course ou une sortie cinéma.

Avec l’élargissement du périmètre du taxi-bus actée pour 2024, c’est aussi le prix du ticket qui a été augmenté : il passe à 4 euros – à ce tarif-là, chaque habitant peut bénéficier de huit trajets mensuels. Raphaël Norblin assume : «Cela permet d’élargir le service tout en maîtrisant le coût pour la collectivité, de l’ordre de 220 000 euros.» L’élu ne croit pas à une desserte publique de l’ensemble de l’agglomération via des lignes de bus régulières. Pas assez de monde, pas assez de budget. Sur la commune de Fontaine-sous-Jouy, par exemple, et ses 877 habitants, «on ne peut pas tout demander», tranche-t-il. Un pis-aller, le TAD ?

Pour Jean-Luc Gibelin, vice-président aux mobilités de la région Occitanie, c’est tout le contraire. L’élu entend bien tordre le cou au cliché d’une offre de mobilité proche d’un taxi ou d’une ambulance. «En Occitanie, le TAD est un dispositif à part entière du transport en commun public régional. La volonté est d’aller vers le tout public.» A Uzès (Gard) par exemple, le transport à la demande se déploie à travers six lignes «virtuelles», avec des points d’arrêts symbolisés (à la CAF, par exemple) et des horaires de ligne. La différence avec un bus lambda ? En l’absence de réservation, il ne passe pas. De quoi éviter des véhicules qui tournent à vide. Le billet, fixé à 2 euros, inclut les correspondances avec le reste du réseau de transport. Pour l’élu régional, ce dispositif du «dernier kilomètre» est aussi un moyen d’évaluer le besoin en transport public d’une zone avant, éventuellement, de pérenniser certaines lignes de bus. Mais cette ambition n’a pour l’heure pas encore été mise en pratique. En 2023, 75 000 voyages ont été effectués en TAD sur toute l’Occitanie. Une goutte d’eau pour changer la donne ?