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Libération
Pace à Demain: tribune

«Une nouvelle génération arrive…»

Par Hugo Biolley, maire du village ardéchois de Vinzieux, et plus jeune maire de France.
Hugo Biolley, maire de Vinzieux en Ardèche, le 28 juin 2023. (Delmarty/Abaca)
par Hugo Biolley, maire du village ardéchois de Vinzieux, et plus jeune maire de France.
publié le 22 janvier 2024 à 17h43
Les 26 et 27 janvier, Libération coconstruit Place à demain avec les moins de 30 ans. Un événement dédié à l’écoute de la jeunesse et ouvert aux débats entre toutes les générations. Une soirée et une journée de rencontres gratuites, au Théâtre du Nord et en partenariat avec la Métropole européenne de Lille, le Théâtre du Nord, la CCI Grand Lille Hauts-de-France, l’université de Lille, la Voix du Nord et BFM Grand Lille. Entrée libre sur inscription.

Voilà trois ans que je suis engagé dans un mandat municipal passionnant, que je tente d’agir sur des problèmes du quotidien qui s’empilent. Pourtant, malgré de beaux projets et tout mon engagement, je constate que l’échelon municipal ne pourra pas combler éternellement la distance grandissante entre les citoyens et nos institutions.

Le monde change. Notre démocratie s’est fortifiée au cours d’une période de croissance économique sur laquelle reposait une atténuation des inégalités ; elle a été forgée dans un monde où l’environnement n’était pas encore un enjeu majeur. Aujourd’hui, la donne est différente. Une nouvelle génération arrive : la première qui a conscience depuis son plus jeune âge que la planète peut devenir inhabitable, mais sans doute la dernière à pouvoir inverser la tendance. Une génération qui ne projette pas son propre avenir avec un meilleur niveau de vie que celui de ses parents, sans perspective d’émancipation économique.

Je fais partie de cette génération : elle se demande dans quel monde elle vivra quand elle aura 30 ou 40 ans. Elle se lève parfois avec une boule au ventre en se disant que jamais nous n’arriverons à relever de tels défis sociaux et environnementaux. Il m’arrive aussi de croiser des personnes désespérées qui ne se voient pas d’avenir ailleurs que dans une précarité augmentée. Celles-là ne comprennent pas pourquoi la société ne s’organise pas autrement pour que chacun puisse vivre décemment. Il y a là des problèmes dont notre démocratie et nos institutions devraient se saisir car nombre de Français, jeunes et moins jeunes, perdent espoir et nourrissent un ressentiment contre les élus, les «autres», la société…

Il n’existe pas en démocratie de pouvoir plus fort que celui que donne un bulletin de vote. Il représente la confiance que l’on place dans nos élus et nos institutions. Le rôle des élections et du débat électoral est tout simplement de changer la vie, de bifurquer, de proposer une alternative. La question se pose alors : quelle est notre capacité à changer, à modifier notre trajectoire, à faire suffisamment ? L’abstention grandissante doit nous alerter : un fossé se crée entre les problèmes de la vie quotidienne, les enjeux d’avenir et les décisions politiques.

Les sujets de justice sociale, de santé, de service public, de fin de vie ou de remise en question de l’utilité des élus couvrent les pages des cahiers de doléances ouverts en 2019. Nous devrions les ouvrir plus souvent : ils sont les premiers témoignages d’une société divisée, bousculée par des crises qui se multiplient.

Regarder cette réalité en face, c’est s’avouer que c’est un peu la merde… Charge à nous, élus et citoyens, de retrousser nos manches et de faire émerger une génération qui saura se révolter face aux défis climatiques et sociaux. Ces défis, pour les relever, nécessiteront d’audacieuses remises en question qui iront probablement jusqu’aux réformes de nos institutions. Les attentes sont grandes, et j’ai l’espoir que nous saurons changer les rouages de nos systèmes avant que les divisions ne les paralysent.