Ce 31 mai, Libération et Paris-I-Panthéon-Sorbonne lancent «l’Université Libé». Une journée pour faire débattre les différents courants progressistes sur des sujets politiques structurants. En partenariat avec le Crédit coopératif, ESS France, Backseat, la Mutualité française et la Fondation Jean-Jaurès. Le débat «Urgence écologique, climat électrique pour la croissance» réunissait Timothée Parrique, chercheur en économie écologique à l’université de Lund (Suède) ; Jean-Marc Jancovici, fondateur et président de The Shift Project, membre du Haut Conseil pour le climat, cofondateur de Carbone 4, ingénieur, consultant en énergie climat ; Delphine Batho, députée Ecologiste-Nupes ; Carole Delga, présidente (PS) de la région Occitanie.
Renoncer ou améliorer ? Les conséquences directes de la «décroissance», thème de ce deuxième débat dans l’amphithéâtre Richelieu de la Sorbonne, ont cristallisé les dissonances entre Delphine Batho, Jean-Marc Jancovici, Timothée Parrique et Carole Delga. Cette dernière, seule élue locale, a trouvé sa formule : «La question de l’indémerdable» à laquelle il faut faire face quand on est maire ou, comme elle, présidente de région. Son «territoire», a-t-elle tenu à rappeler, est 20 % plus pauvre que la moyenne nationale. Delga insiste pour ne pas mettre en œuvre une décroissance «trop abrupte».
«Cette transition est indispensable, mais il faut des étapes !» s’exclame-t-elle, rappelant les problématiques locales : «Quand les gosses doivent faire une heure de trajet pour aller au lycée, quand les trains ne sont pas à l’heure…» Si les autres font rimer décroissance avec renoncement et réduction, Delga parle d’amélioration, notamment pour sa région : énergie positive, ouverture de voies ferroviaires, diminution de la consommation énergétique… Mais ce qui a fait tiquer l’assemblée, c’est le projet contesté de l’autoroute A69 reliant Castres à Toulouse. Piquée par Batho qui lui rappelle son soutien à cette future infrastructure critiquée par les écologiqtes, Delga répond nécessité pour la population locale d’«avoir du boulot, [d’]implanter des entreprises, [de] stopper l’hypermétropolisation de Toulouse». «Il y a un réel sentiment d’abandon de la population, et je n’ai pas envie que les entreprises se barrent. Je souhaite que les habitants puissent vivre au pays dignement», affirme-t-elle.
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«Il y a une chose que l’on n’a pas, c’est du temps», lui renvoie direct Batho. «Transitionner sur le temps long, cela veut dire qu’en attendant on détruit. Cela fait trente ans que l’on n’a plus le temps, la question écologique se résout au présent, ici et maintenant», défend-elle, déclenchant des applaudissements. Ce à quoi Delga tente de répondre : «Il faut d’abord trouver le temps de susciter l’adhésion du peuple, car s’il est angoissé il votera extrême droite.» «Ce n’est pas l’écologie qui a fait monter l’extrême droite», riposte Batho. Jancovici tente la synthèse : «Si on la fait cette autoroute, on […] continue et on ne peut pas changer l’économie en continuant à faire la même chose.» Pour le fondateur du Shift Project, «dans les problèmes indémerdables, il y a la question du traitement des perdants». Tout le monde sera d’accord.