Inlassablement, à Anvers ou au Mexique, en Italie comme dans une
vaste maison près de Paris louée pour l'occasion, un homme qui avait toute l'apparence (mais seulement l'apparence) du tranquille universitaire expliquait les arcanes de la dialectique révolutionnaire et de l'alliance de classes aux «stages» politiques de la IVe Internationale. Sur un ton didactique et gouailleur, avec un léger accent flamand, il a initié plusieurs générations de militants trotskistes à une théorie marxiste qu'il émaillait de formules bien à lui, comme «la logique diabolique du fractionnisme». Dimanche matin, un millier de personnes, jeunes sympathisants mêlés aux vieux briscards de la constellation révolutionnaire, ont accompagné les cendres d'Ernest Mandel au mur des Fédérés du Père-Lachaise.
Entre la stèle dédiée aux volontaires des Brigades internationales et celle perpétuant la mémoire des résistants communistes, ce lutteur acharné, emporté par une crise cardiaque en juillet dernier à l'âge de 72 ans, ne pouvait pas mieux finir. Et même, pour cet hommage funéraire, il a eu droit non seulement à la présence de vieux camarades qui s'étaient séparés de lui à la faveur de désaccords tonitruants, typiques du mouvement trotskiste comme Michel Pablo , mais aussi à la présence symbolique d'ennemis politiques de longue date: le PCF et le PS.
Car Ernest Mandel était une personnalité dont l'influence portait beaucoup plus loin que les maigres rangs de la IVe Internationale: interdit de séjour en Fran