J’ai souvent eu des problèmes avec le passage des frontières. Un jour nous sommes dans les années 70, Raymond Marcellin est ministre de l’Intérieur je prends l’avion pour aller à Stockholm. Dans la salle d’enregistrement, une demi-heure, trois quarts d’heure avant de monter dans l’avion, des flics de la police de l’air et des frontières me demandent mes papiers: «C’est vous, Alain Krivine? Suivez-nous.» Je leur demande pourquoi. «On a des ordres, suivez-nous.» Ils m’emmènent au commissariat central de Roissy. Et, très fiers de leur prise, ils frappent, ouvrent une porte. Il y avait là un chef derrière un grand bureau.
«On vous l'amène, il est là.» Le type lève les yeux, absolument affolé: «Mais qui? Quoi?» Alors il me reconnaît et, très poli, me demande: «Mais qu'est-ce que vous faites là , Alain Krivine?
Je n'en ai aucune idée, je n'en sais rien.» Il interroge les deux autres: «Mais qu'est-ce qu'il a fait?» Les deux flics, emmerdés, rougissants, se tortillent les doigts. Il répète sa question: «Pourquoi vous m'amenez monsieur Krivine?»
Un des flics balbutie alors: «Mais vous savez bien ,le livre!
Mais quel livre? De quoi vous parlez?»
Et l'autre, cramoisi: «Mais vous savez très bien, le livre enfin, le livre!»
Effectivement, Raymond Marcellin avait fait distribuer dans tous les postes-frontières un livre plein de noms de gauchistes . Alors, le type se met à gueuler: «Bande d'abrutis! Oui, le livre! Mais vous avez bien vu qu'il était écrit: "à suivre discrètement!» Le chef