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Libération
Reportage

«Après la chute de Morgane, l'huissier a dit : "On continue"»

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publié le 4 septembre 2008 à 4h52

Envoyé spécial à Istres Au troisième étage, sur son balcon, hier midi, son linge sèche toujours. Plus bas, là où Morgane est tombée, quelques fleurs ont été posées. C'est une résidence HLM calme et proprette d'Istres (Bouches-du-Rhône). Morgane, 33 ans, mère de trois enfants, s'est jetée par le balcon mardi matin, quand l'huissier entrait pour l'expulser, en raison d'une dette de 11 000 euros à l'Opac, pour vingt-deux mois de loyers impayés.

«Déménageurs». «J'entends ce bruit sourd, je sors, je vois cette masse. C'est Morgane !» raconte le voisin du rez-de-chaussée, Freddy Viale, 68 ans. «Elle est tombée sur le ventre. Un bruit profond, je l'entends encore. Je m'approche, elle ouvre les yeux, elle me dit :"Bébé. j'ai mal."» A quelques dizaines de mètres, il y a la cour de l'école maternelle du Clos-de-la-Roche, où son fils de 4 ans vient de faire sa rentrée. Mais, dans l'herbe jaunie, Morgane agonise. Le médecin des secours tente le massage cardiaque. En vain. «Sa tension baissait, raconte Freddy. J'entendais "9. 10. 7. 5." Au bout de vingt-six minutes, le médecin s'est arrêté. Tout en transpiration, les yeux embués. Il a dit : "On a tout essayé."»

Depuis, dans le quartier de Rassuen II, c'est la tristesse et la colère. Freddy assure : «Au balcon, après sa chute, l'huissier a dit : "On continue, débarrassez-moi la cuisine."» Le voisin de palier de Morgane, Marc Sayouz, 58 ans, employé chez ArcelorMittal, a entendu la même chose. «Mais un