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Libération

"Mémoire à deux voix": Le point d'orgue d'une longue cérémonie des adieux

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publié le 11 avril 1995 à 4h16

Le point d'orgue d'une longue cérémonie des adieux Le «Mémoire» participe de la volonté du Président d'ordonner sa biographie avant de quitter la scène.

Contrairement à tant d'hommes politiques, qui ne consentent à gratifier leurs concitoyens de leurs réflexions qu'après leur mort, François Mitterrand a choisi le mode anthume pour évoquer son oeuvre et ses vies. Avec la publication de ce Mémoire à deux voix, il poursuit un exercice d'autojustification entamé à la fin de l'été dernier, lorsque, son cancer l'ayant brutalement rattrapé, le livre de Pierre Péan, Une jeunesse française (1), levait sans apprêt le voile sur son avant-guerre et ses années vichystes. Fatigué, épuisé même, le Président avait choisi de se livrer à la télévision à un exercice contesté, au cours duquel il avait nié avec un aplomb sidérant avoir connu en temps utile les lois antijuives de Vichy.

Sans doute le rôle d'Elie Wiesel n'est-il pas celui d'un enquêteur, et le dialogue ultra-léché ­ dans ce domaine, Mitterrand est un orfèvre ­ n'est-il pas le genre qui prévaut lorsqu'on entend aller au fond des choses. En fait, cet exercice procède plutôt de la cérémonie des adieux qu'il a entamée depuis le début de l'année. Décorant ici, inaugurant là, visitant ailleurs tel monument à sa gloire, ouvrant les portes de l'Elysée à ceux qui ne les avaient pas encore franchies. Et ces cérémonies sont sources d'inépuisables confidences sur la vie, sur la mort, sur Dieu et les arbres, la terre et les temps anciens. Quant